Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 30 septembre 2014, 4 août 2016 et 16 novembre 2016, M. G... C..., représenté par Me DABAN, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d’annuler la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de l’intérieur sur son recours gracieux en date du 28 mai 2014 contre la décision du même jour établissant le tableau de mutations, ainsi que les arrêtés par lesquels ce ministre a affecté Mme B... et M. F...au commissariat de police de Pau à compter du 1er septembre 2014 ;

2°) d’enjoindre au ministre de l’intérieur de soumettre à la commission administrative paritaire compétente sa demande de mutation ;

3°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation des préjudices subis ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Par un mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2016, le ministre de l’intérieur conclut au rejet de la requête.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu : - la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - la loi n° 95-654 du 9 mai 1995 ; - le décret n° 82-451 du 28 mai 1982 ; - le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Le Guillou, - les conclusions de M. Béroujon, rapporteur public, - et les observations de Me DABAN, représentant M.C....

1. Considérant que M. G...C..., gardien de la paix titularisé le 1er avril 2005, a été affecté le 1er novembre 2010 à la compagnie républicaine de sécurité d’Agen ; que, le 15 avril 2014, il a sollicité sa mutation pour rapprochement de conjoint à la compagnie républicaine de sécurité de Pau ; que, le 28 mai 2014, constatant que son nom ne figurait pas dans le tableau de mutations de l’année 2014 dressé par le ministre de l’intérieur mais que deux agents étaient mutés au commissariat de police de Pau, il a formé un recours gracieux contre la décision établissant ce tableau, en tant qu’il n’y figurait pas ; qu’il demande au tribunal d’annuler les arrêtés par lesquels le ministre de l’intérieur a affecté Mme B...et M.F..., gardiens de la paix, au commissariat de police de Pau à compter du 1er septembre 2014, la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de l’intérieur sur son recours gracieux et doit être regardé comme demandant également l’annulation de la décision établissant le tableau de mutations en tant qu’il n’y figure pas ; qu’il demande également la réparation des préjudices subis du 1er septembre 2014 au 1er septembre 2016, date à laquelle il a finalement été muté à Pau ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. Considérant qu’aux termes de l’article 60 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat : « L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires. / Dans les administrations ou services où sont dressés des tableaux périodiques de mutations, l'avis des commissions est donné au moment de l'établissement de ces tableaux » ; qu’aux termes de l’article 34 du décret du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires : « Les commissions administratives siègent en formation restreinte lorsqu'elles sont saisies de questions résultant de l'application des articles 55, 58, 67, 45, 48, 60, 70, 72 de la loi du 11 janvier 1984 (…) » ; qu’aux termes de son article 35 : « Lorsque les commissions administratives paritaires siègent en formation restreinte, seuls les membres titulaires et, éventuellement, leurs suppléants représentant le grade auquel appartient le fonctionnaire intéressé et les membres titulaires ou suppléants représentant le grade immédiatement supérieur ainsi qu'un nombre égal de représentants de l'administration sont appelés à délibérer » ; qu’il ressort de la page 17/57 du procès-verbal de la séance de la commission administrative paritaire nationale du 28 mai 2014 au cours de laquelle les demandes de mutation de M.C..., Mme B... et M. F..., gardiens de la paix, ont été examinées, que les représentants des grades de gardien de la paix, de brigadier de police, mais aussi de brigadier-chef de police et de major de police ont pris part au délibéré ; que le ministre de l’intérieur produit, en défense, une attestation du chef du bureau des gradés et gardiens de la paix en date du 2 février 2016 selon laquelle le procès-verbal de la séance de la commission administrative paritaire nationale du 21 mars 2014, dont il était le secrétaire, serait entaché d’une erreur matérielle et seuls les représentants des grades de gardien de la paix et de brigadier de police auraient délibéré sur les mutations des gardiens de la paix ; que, toutefois, d’une part, la séance du 21 mars 2014 n’est pas celle au cours de laquelle a été examiné le tableau de mutation litigieux ; que, d’autre part, à supposer que cette attestation concerne la séance du 28 mai 2014, elle ne suffit pas à contredire les termes du procès-verbal de cette séance, dès lors que le tableau de mutation est commun aux quatre grades du corps d’encadrement et d’application de la police nationale, qu’il liste par ordre alphabétique les fonctionnaires sans tenir compte de leur grade et qu’aucun autre document ne permettait à la commission administrative paritaire nationale de délibérer en formation restreinte selon les grades des candidats à la mutation ; qu’ainsi la commission administrative paritaire qui a donné son avis sur les demandes de mutation de M. C..., Mme B...et M. F... doit être regardée comme ayant siégé dans une formation irrégulière ; que ce vice, qui a privé M. C... d’une garantie, constitue une irrégularité de nature à entacher la légalité des décisions affectant au commissariat de police de Pau à compter du 1er septembre 2014 M. F...et Mme B..., n’inscrivant pas M. C...au tableau des mutations et rejetant son recours gracieux contre cette dernière décision ;

3. Considérant qu’il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que M. C...est fondé à demander l’annulation des décisions du ministre de l’intérieur en date du 28 mai 2014 établissant le tableau de mutations en tant que son nom n’y figure pas, rejetant son recours gracieux formé contre cette décision, et affectant Mme B... et M. F...au commissariat de police de Pau à compter du 1er septembre 2014 ;

Sur les conclusions à fin d’injonction :

4. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 6 mai 2016, M. C... a été muté à compter du 1er septembre 2016 à la compagnie républicaine de sécurité de Pau ; qu’ainsi ses conclusions tendant à ce qu’il soit enjoint au ministre de l’intérieur de soumettre à la commission administrative paritaire compétente sa demande de mutation dans ce service sont devenues sans objet ; que, par suite, il n’y a pas lieu d’y statuer ;

Sur les conclusions indemnitaires :

5. Considérant que M. C....soutient qu’en raison de son éloignement répété de sa famille et de son domicile, il a subi un préjudice moral ; que, toutefois, cet éloignement est principalement dû aux déplacements fréquents qu’effectuent, pour les besoins du service, les compagnies républicaines de sécurité ; qu’ainsi son préjudice moral ne trouve pas sa cause dans le refus de mutation dont il a fait l’objet le 28 mai 2014 ;

6. Considérant que M. C....ne justifie pas que sa rémunération à la compagnie républicaine de sécurité de Pau aurait été supérieure à celle dont il a bénéficié à la compagnie républicaine de sécurité d’Agen ; qu’ainsi, le préjudice financier allégué n’est pas établi ;

7. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les conclusions indemnitaires de M. C...doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 200 euros au titre des frais de procès exposés par M. C...et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La décision du ministre de l’intérieur en date du 28 mai 2014 établissant le tableau de mutations, en tant que M. C....n’y figure pas, la décision de rejet du recours gracieux formé contre cette décision, et les arrêtés affectant Mme B...et M. F...au commissariat de police de Pau à compter du 1er septembre 2014 sont annulés.

Article 2 : Il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d’injonction de M. C....

Article 3 : L’Etat versera à M. C...une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. G...C..., à Mme E...B..., à M. D...F...et au ministre de l’intérieur.