Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 27 octobre 2020 et le 16 juillet 2021, Mme K... M..., M. L... I..., M. E... H..., M. A... B..., M. F... J... et M. G... C..., représentés par Me Bonicatto, demandent au tribunal, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d’annuler la décision du 28 septembre 2020 par laquelle le président de la communauté d’agglomération du Bassin d’Arcachon Nord (COBAN) a refusé de faire droit à la demande de vingt des trente-huit conseillers de son assemblée délibérante visant à la convocation du conseil communautaire avec inscription à l’ordre du jour d’un « vote de confiance relatif à la poursuite de son mandat de président » ;

2°) d’enjoindre, à titre principal, au président de la COBAN de soumettre à son bureau, pour avis, en vue d’une prochaine séance du conseil communautaire, un ordre du jour comportant la question d'un vote de confiance relatif à la poursuite de son mandat de président, et ce dans un délai de cinq jours à compter de la notification à la COBAN du jugement à intervenir, puis de convoquer le conseil communautaire en inscrivant ce vote à l'ordre du jour de sa séance ;

3°) d’enjoindre à titre subsidiaire au président de la COBAN de procéder à un nouvel examen de la demande de convocation et d'inscription à l'ordre du jour formulée par le courrier du 17 septembre 2020, dans un délai de cinq jours à compter de la notification à la COBAN du jugement à intervenir.

Ils soutiennent que :

- la décision litigieuse méconnaît les articles L. 2121-9 et L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales ;

- elle est illégale en raison de l’intérêt local attaché à la demande formulée le 17 septembre 2021, laquelle ne présentait pas un caractère abusif.

Par des mémoires en défense enregistrés le 16 juin 2021 et le 6 août 2021, ce dernier non communiqué, la communauté de communes du Bassin d’Arcachon Nord conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande du 17 septembre 2021 ne portait pas sur un objet d’intérêt local, en ce qu’elle ne relevait pas des compétences de la COBAN ;

- la demande est abusive, le bon fonctionnement de la collectivité n’étant pas compromis par les circonstances qui la motivaient.

Par ordonnance du 19 juillet 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 19 août 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

- le rapport de M. Pouget,

- les conclusions de Mme Jaouën, rapporteur public,

- et les observations de Me Bonicatto, représentant les requérants, et de Me Hatinguais, représentant la COBAN.

Considérant ce qui suit :

1. Par un courrier daté du 17 septembre 2020, vingt conseillers communautaires de la communauté d’agglomération du Bassin d’Arcachon Nord (COBAN) ont saisi le président de cet établissement public de coopération intercommunale d'une demande visant à la convocation du conseil communautaire et à l'inscription à l'ordre du jour de la séance dudit conseil d'un vote de confiance relatif à la poursuite du mandat de ce même président, M D.... Le 28 septembre 2020, le président de la COBAN a refusé de faire droit à cette demande. Les requérants, figurant parmi les conseillers signataires de la demande du 17 septembre 2020, demandent l’annulation de cette décision.

Sur les conclusions aux fins d’annulation :
2. Aux termes de l’article L. 5211-1 du code général des collectivités territoriales, pris dans ses alinéas 1 et 2 : « Les dispositions du chapitre Ier du titre II du livre Ier de la deuxième partie relatives au fonctionnement du conseil municipal sont applicables au fonctionnement de l'organe délibérant des établissements publics de coopération intercommunale, en tant qu'elles ne sont pas contraires aux dispositions du présent titre. Pour l'application des dispositions des articles L. 2121-8, L. 2121-9, L. 2121-19 et L. 2121-22 et L2121-27-1, ces établissements sont soumis aux règles applicables aux communes de 1 000 habitants et plus. ». Aux termes de l’article L. 2121-9 du même code : « Le maire peut réunir le conseil municipal chaque fois qu'il le juge utile. Il est tenu de le convoquer dans un délai maximal de trente jours quand la demande motivée lui en est faite par le représentant de l'Etat dans le département ou par le tiers au moins des membres du conseil municipal en exercice dans les communes de 1 000 habitants et plus et par la majorité des membres du conseil municipal dans les communes de moins de 1 000 habitants. En cas d'urgence, le représentant de l'Etat dans le département peut abréger ce délai. ». Aux termes de l’article L. 2121-29 du même code : « Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune. Il donne son avis toutes les fois que cet avis est requis par les lois et règlements, ou qu'il est demandé par le représentant de l'Etat dans le département. Lorsque le conseil municipal, à ce régulièrement requis et convoqué, refuse ou néglige de donner avis, il peut être passé outre. Le conseil municipal émet des vœux sur tous les objets d'intérêt local. ».
3. Il résulte des dispositions précitées que le président d’un établissement public de coopération intercommunale est tenu, lorsque la demande motivée lui en est faite par le tiers au moins des membres de son organe délibérant en exercice, de convoquer cet organe délibérant dans un délai maximum de trente jours pour délibérer et que, si la demande précise les questions à inscrire à l'ordre du jour, il ne peut refuser, en tout ou partie, de les inscrire que s'il estime, sous le contrôle du juge, qu'elles ne sont pas d'intérêt local ou que la demande présente un caractère manifestement abusif. En outre, il est loisible aux organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale de prendre des délibérations qui se bornent à des vœux, des prises de position ou des déclarations d’intention. De telles délibérations peuvent porter sur un objet à caractère politique dès lors qu’il présente un intérêt local.
4. Ainsi qu’il a été dit au point 1, vingt des trente-huit conseillers communautaires de la COBAN ont demandé au président de cet établissement public de coopération intercommunale de convoquer le conseil communautaire avec pour ordre du jour un vote de confiance sur la personne de ce même président. Cette demande de réunion exceptionnelle de l’organe délibérant était motivée par l’annonce faite par M. D..., quelques jours plus tôt, de sa candidature aux élections sénatoriales sous l’étiquette d’un parti politique. Or, quand bien même elle repose sur des considérations politiques, la prise de position que constitue la question de la confiance accordée au président de l’assemblée délibérante par les élus doit être regardée comme relevant de l’intérêt local et ne présente pas un caractère abusif. Par suite, le président de la COBAN, conformément aux principes exposés au point 3, était tenu de déférer à demande de convocation du conseil communautaire dont il a été saisi le 17 septembre 2020 et a entaché sa décision d’illégalité en refusant de réunir ce conseil dans le délai de trente jours.

5. Les requérants sont dès lors fondés à demander l’annulation de la décision du 28 septembre 2020 par laquelle le président de la COBAN a refusé de convoquer le conseil communautaire et d’inscrire à l'ordre du jour de la séance un vote de confiance relatif à la poursuite de son mandat.
Sur les conclusions aux fins d’injonction :
6. Aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. (…) ». 7. En raison du motif qui la fonde, l’annulation de la décision attaquée implique nécessairement qu’il soit enjoint au président de la COBAN de prendre toutes dispositions, dans un délai d’un mois à compter de la notification du présent jugement, pour que soit inscrit à l’ordre du jour d’une séance du conseil communautaire un « vote de confiance relatif à la poursuite du mandat de président de M. D... ».
Sur les frais de l’instance : 8. Les requérants n’étant pas partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées par la COBAN sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu’être rejetées.
DÉCIDE :

Article 1er : La décision du 28 septembre 2020 du président de la COBAN est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au président de la COBAN de prendre toutes dispositions, dans un délai d’un mois à compter de la notification du présent jugement, pour que soit inscrit à l’ordre du jour d’une séance du conseil communautaire un « vote de confiance relatif à la poursuite du mandat de président de M. D... ».

Article 3 : Les conclusions présentées par la COBAN sur le fondement de l’article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme K... M..., à M. L... I..., à M. A... B..., à M. F... J..., à M. G... C... et à la communauté de communes du Bassin d'Arcachon Nord.