Vu la procédure suivante :

Par un déféré enregistré au greffe du tribunal administratif de Bordeaux le 20 juillet 2020, complété le 24 juillet suivant, le préfet de Lot-et-Garonne demande au tribunal d’annuler la délibération du 30 janvier 2020 par laquelle le comité syndical du syndicat départemental d’adduction d’eau potable et d’assainissement de Lot-et-Garonne a décidé que ce dernier était assimilable à une commune dont la strate se situe entre 10 000 et 20 000 habitants.

Il soutient que : - la délibération attaquée est entachée d’erreur manifeste d’appréciation ; - les critères à remplir sont cumulatifs ; - en l’occurrence, son champ de compétence est restreint ; - son budget n’est pas suffisamment important ; - le nombre d’agents n’est pas suffisant.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 août 2020, le syndicat départemental d’adduction d’eau potable et d’assainissement de Lot-et-Garonne, représenté par Mes Cabanes et Polderman, conclut au rejet du déféré et à ce qu’une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de l’Etat sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- l’article 1er du décret du 25 mai 2021, sur la base duquel la délibération en litige a été prise, méconnaît le principe de libre administration des collectivités territoriales et le principe d’égalité ; il n’appartient pas au pouvoir réglementaire d’apporter une limitation à la libre administration ;

- le fait que le recrutement du personnel soit encadré porte nécessairement atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales ;

- l’imprécision des textes confère au contrôle de légalité un pouvoir discrétionnaire incompatible avec le principe d’égalité de traitement ;

- le syndicat remplit les trois conditions cumulatives fixées par les textes.

Vu la délibération déférée et les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 ;

- le décret n° 2017-556 du 14 avril 2017 ;

- le décret n° 2007-1828 du 24 décembre 2007 ;

- le décret n° 87-1101 du 30 décembre 1987 ;

- le décret n° 2000-954 du 22 septembre 2000 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendu au cours de l’audience publique :

- le rapport de Mme de Paz, rapporteure,

- les conclusions de M. Chemin, rapporteur public,

- et les observations de Me Michelin, représentant le syndicat départemental d’adduction d’eau potable et d’assainissement de Lot-et-Garonne.

Une note en délibérée a été présentée le 15 octobre 2021 par le syndicat départemental d’adduction d’eau potable et d’assainissement de Lot-et-Garonne.

Considérant ce qui suit :

1. Dans le but de pouvoir recruter et offrir un déroulement de carrière satisfaisant à des cadres de haut niveau de la fonction publique territoriale, le conseil syndical du syndicat départemental d’adduction d’eau potable et d’assainissement de Lot-et-Garonne (Eau 47) a, par une délibération n° 20-2003-C du 30 janvier 2020, décidé qu’il était assimilable à une commune dont la strate se situe entre 10 000 et 20 000 habitants. Le préfet de Lot-et-Garonne demande au tribunal d’annuler cette délibération.

2. Aux termes de l’article 1er du décret du 22 septembre 2000 relatif aux règles d’assimilation des établissements publics locaux aux collectivités territoriales pour la création de certains grades de fonctionnaires territoriaux susvisé : « Lorsque, pour la création de grades, les statuts particuliers des cadres d'emplois de fonctionnaires territoriaux prévoient l'assimilation des établissements publics locaux à des communes, cette assimilation se fait, sous réserve des dispositions des articles 2 à 5, au regard de leurs compétences, de l'importance de leur budget et du nombre et de la qualification des agents à encadrer. ».

3. Il résulte de ces dispositions que les critères de la compétence, de l’importance du budget et du nombre et de la qualification des agents à encadrer sont cumulatifs.

4. Il ressort des pièces du dossier, notamment des statuts du syndicat départemental Eau 47 que cet établissement public de coopération intercommunale est issu de la dissolution de la Fédération départementale d’eau potable et d’assainissement de Lot-et-Garonne et du transfert des compétences en distribution d’eau potable, assainissement collectif et non collectif des syndicats Nord du Lot, Nord de Marmande, Brame, Sud d’Agen et Région de Tournon d’Agenais, dissous le 31 décembre 2012, et du transfert de compétence du SIVOM de la région de Casteljaloux et des syndicats des eaux et d’assainissement de Penne d’Agenais-Saint-Sylvestre, du syndicat des Eaux de Sud Marmande, du syndicat intercommunal des eaux et d’assainissement de la région du Mas d’Agenais, du syndicat intercommunal des eaux de Xaintrailles-Montgaillard et du syndicat de Damazan-Buzet et Clairac-Castelmoron. Le syndicat Eau 47 est chargé, pour l’ensemble de ses membres, d’organiser et d’harmoniser les services d’adduction d’eau potable, d’assainissement collectif et d’assainissement non collectif, et de leur apporter dans ces domaines son appui administratif et technique. Il peut aussi, pour le compte des membres qui lui ont transféré les compétences opérationnelles, assurer en leur lieu et place la gestion des services publics d’eau potable (gestion et protection de la ressource, production, transport, stockage et distribution), d’assainissement collectif (collecte, transport et épuration des eaux usées, élimination des boues produites et autres sous-produits de traitement, contrôle des missions), d’assainissement non collectif (contrôle des installations, conception et travaux de réalisation ou de réhabilitation et conseils aux particuliers et aux acteurs du secteur), établir les schémas de distribution d’eau potable et des zonages d’assainissement et effectuer toutes analyses, études, recherches de financements auprès de partenaires et mener des actions de coopération décentralisée. Ces missions de service public industriel et commercial sont exercées sur un vaste territoire regroupant 274 communes du département et deux établissement de coopération intercommunal à fiscalité propre, au bénéfice de 105 000 abonnés pour l’eau et 39 000 abonnés pour l’assainissement, et reflètent des compétences étendues, quand bien même celles-ci sont moins diversifiées par nature que celles d’une commune. Il ressort également des pièces du dossier que le budget de l’établissement public, qui doit inclure non seulement le budget principal mais aussi les budgets annexes qui lui sont rattachés, ce qu’omet le préfet dans son comparatif, s’élève à 104 035 105 euros, montant qui n’est pas inférieur à celui d’une commune de la strate considérée. Enfin, ainsi que le fait valoir le syndicat Eau 47, les compétences qui sont les siennes requièrent un haut niveau de technicité et nécessitent l’emploi de personnels hautement qualifiés dans les domaines de l’eau et de l’assainissement. A cet égard, en se bornant à faire référence à un effectif moyen de 259 agents pour les communes de la strate de 10 000 à 20 000 habitants, le préfet de Lot-et- Garonne n’établit pas que l’effectif de 74 agents que compte le syndicat exclurait son assimilation à une commune de 10 000 habitants du bas de la strate, terme de comparaison pertinent, alors que par ailleurs il justifie de 12 % d’agents de catégorie A, pour 28 % d’agents de catégorie B et 60 % d’agents de catégorie C. Dans ces conditions, le comité syndical du syndicat Eau 47 a pu légalement décider son assimilation à une commune de la strate de 10 000 à 20 000 habitants.

5. Il résulte de ce qui précède que le préfet de Lot-et-Garonne n’est pas fondé à demander l’annulation de la délibération attaquée.

Sur les frais liés à l’instance :

6. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l’Etat la somme demandée par le syndicat départemental Eau 47 au titre de ses frais de procès.

DECIDE :

Article 1er : Le déféré présenté par le préfet de Lot-et-Garonne est rejeté.

Article 2 : Les conclusions présentées par le syndicat intercommunal Eau 47 au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié au préfet de Lot-et-Garonne et au syndicat départemental d’adduction d’eau potable et d’assainissement de Lot-et-Garonne (Eau 47).