Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 21 septembre 2021, le syndicat CGT du conseil départemental de Lot-et-Garonne, représenté par Me Tandonnet, demande au juge des référés :

1°) d’ordonner, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l’exécution de la note de la présidente du conseil départemental de Lot-et-Garonne du 13 août 2021 relative à la mise en œuvre de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur la légalité de cette décision ;

2°) de mettre à la charge du conseil départemental de Lot-et-Garonne une somme de 2 000 euros en application de l’article L. 761 1 du code de justice administrative.

Le syndicat CGT du conseil départemental de Lot-et-Garonne soutient que :

- l’urgence est caractérisée compte tenu des obligations contenues dans la loi du 5 août 2021 et les sanctions qui y sont attachées en cas de méconnaissance ;

- la note a été prise sans consultation du comité technique, en méconnaissance de l’article 33 de la loi du 26 janvier 1984.

Par un mémoire en défense, enregistrés le 5 octobre 2021, le conseil départemental de Lot-et-Garonne conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge du syndicat CGT du conseil départemental de Lot-et-Garonne au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le conseil départemental de Lot-et-Garonne soutient que :

- la note attaquée est une circulaire non impérative et une mesure d’ordre intérieur qui ne fait pas grief ; la requête au fond est donc totalement ou, à minima, partiellement irrecevable ;

- la condition d’urgence n’est pas remplie compte tenu de l’intérêt public à la mise en œuvre de la loi du 5 août 2021, des effets limités de la note au regard des obligations posées par la loi elle-même et du fait qu’aucun agent du département n’a été effectivement suspendu de ses fonctions ;

- le moyen soulevé par le syndicat CGT du conseil départemental de la Gironde est inopérant.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la requête enregistrée le 21 septembre 2021 sous le n°2104866 par laquelle le syndicat CGT du conseil départemental de Lot-et-Garonne demande l’annulation de la note attaquée.

Vu :

- la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 ;

- la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 ;

- le décret n°2021-699 du 1er juin 2021 ;

- le code de justice administrative.

Vu la décision du 1er septembre 2021 par laquelle la présidente du tribunal a désigné M. Dufour pour exercer les fonctions de juge des référés.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Au cours de l’audience publique tenue le 7 octobre 2021 à 10h en présence de Mme Gioffré, greffière d’audience, M. Dufour a lu son rapport et entendu :

- les observations de Me O’Kelly, qui reprend ses écritures sans soulever de nouveaux moyens ;

- les observations de Me Jeanneau, représentant le département de Lot-et-Garonne, qui reprend ses écritures sans soulever de nouveaux moyens.

La clôture de l’instruction a eu lieu à l’issue de l’audience, en application de l’article R. 522-8 du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. (…) ».

2. Par une note diffusée par courriel le 13 août 2021 intitulée « Covid 19 / Passe sanitaire et obligation vaccinale », et modifiée le 6 septembre 2021, la présidente du conseil départemental de Lot-et-Garonne, après avoir en préambule invité tous les agents départementaux à se faire vacciner et expliqué en quoi la vaccination constituait un enjeu majeur de santé publique, a rappelé les dispositions de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire et exposé leurs modalités d’application aux agents des services départementaux. Ainsi, dans une première partie, consacrée à l’obligation vaccinale, la note précise les catégories de personnels soumis à cette obligation, annonce l’envoi d’une information par courriel à ces agents, détaille le calendrier de mise en place de l’obligation vaccinale, les documents devant être présentés pour chaque période, les modalités de transmission de ces documents et de vérification par la direction des ressources humaines, rappelle les conséquences en cas de non-respect de l’obligation vaccinale et l’existence d’une autorisation spéciale d’absence pour cause de vaccination. Dans une seconde partie, consacrée au passe sanitaire, la note rappelle la nature des documents en tenant lieu, le champ des établissements, lieux et événements concernés, et énonce, s’agissant des services départementaux, que les services organisateurs d’une manifestation ou d’un événement soumis au passe sanitaire devront, à compter du 30 août 2021, s’assurer que l’ensemble des agents participants dispose d’un passe sanitaire valide, que les agents participant à des salons ou séminaires professionnels en dehors de locaux habituels devront s’assurer que leur passe sanitaire est requis et valide le jour de l’événement, enfin que les usagers de la médiathèque et des archives départementales sont soumis au passe sanitaire, au contraire des agents pour lesquels cette obligation n’apparait pas justifiée. Le syndicat CGT du conseil départemental de Lot-et-Garonne demande au juge des référés de suspendre l’exécution de cette note, dans sa version initiale.

3. La condition d’urgence à laquelle est subordonné le prononcé d’une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre. Il appartient au juge des référés d’apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies, si les effets de l’acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l’exécution de la décision soit suspendue. S’agissant d’une note ou d’une circulaire relative à l’application de dispositions législatives ou réglementaires, l’urgence doit être appréciée compte tenu de ses effets propres. A cet égard, une note ou une circulaire qui réitère, en prescrivant de l’appliquer, une règle contenue dans des dispositions en vigueur n’est pas, par elle-même, constitutive d’une situation d’urgence.

4. Pour justifier de l’existence d’une situation d’urgence, le syndicat CGT du conseil départemental de Lot-et-Garonne fait valoir que la loi du 5 août 2021 comporte des mesures particulièrement sensibles en terme de libertés individuelles des agents, mises en œuvre depuis le 15 septembre 2021 et pouvant aboutir à la suspension de leurs fonctions et à la perte de leur rémunération. Se bornant à invoquer un vice de procédure tiré du défaut de consultation du comité technique départemental, il ne soutient pas que l'interprétation que la présidente du conseil départemental donne de la loi qu’elle a pour mission de faire appliquer, en méconnaîtrait le sens et la portée, et ne fait état d’aucun effet propre de la note attaquée. Dans ces conditions, la condition d’urgence exigée par l’article L. 521-1 du code de justice administrative n’est pas remplie. Il s’ensuit que, sans qu’il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en défense, la requête du syndicat CGT du conseil départemental de Lot-et-Garonne doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge du syndicat CGT du conseil départemental de Lot-et-Garonne le versement au département de Lot-et-Garonne d’une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761‑1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête du syndicat CGT du conseil départemental de Lot-et-Garonne est rejetée.

Article 2 : Le syndicat CGT du conseil départemental de Lot-et-Garonne versera au département de Lot-et-Garonne une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée au syndicat CGT du conseil départemental de Lot-et-Garonne et au département de Lot-et-Garonne.