Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 1802719, par une requête, enregistrée le 29 juin 2018, Mme E...B...C...et M. F...G..., représentés par la SCP Bouyer-Bourgeois, demandent au tribunal :

1°) de condamner la commune d’Eymet à leur verser la somme de 96 353,84 euros indexée sur l’indice INSEE du coût de la construction en réparation du préjudice matériel, la somme de 650 euros par mois depuis le 20 août 2015 jusqu’à la date de leur retour dans leur maison d’habitation en réparation du préjudice de jouissance, les sommes de 9 030 euros et 350 euros par mois jusqu’au jour de la remise en location de l’appartement n° 1 en réparation du préjudice économique et la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice moral subis du fait des dommages causés à leur propriété immobilière, située au n° 42 rue du Couvent à Eymet ;

2°) de mettre à la charge de la commune d’Eymet la somme de 7 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. ………………………………………………………………………………………………….. Par un mémoire en défense, enregistré le 24 décembre 2018, la commune d’Eymet, représentée par la SELARL Goutal, Alibert et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme B...C...et M. F...G...la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. ……………………………………………………………………………………………………

2° Sous le n° 1804368, par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 octobre 2018 et 29 janvier 2019, Mme E... B...C...et M. F...G..., représentés par la SCP Bouyer-Bourgeois, demandent au juge des référés, saisi sur le fondement de l’article R. 541-1 du code de justice administrative :

1°) de condamner la commune d’Eymet à leur verser la somme de 100 000 euros en réparation des préjudices subis du fait des dommages causés à leur propriété immobilière, située au n° 42 rue du Couvent à Eymet ;

2°) de mettre à la charge de la commune d’Eymet la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. …………………………………………………………………………………………………….

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 décembre 2018, la commune d’Eymet, représentée par la SELARL Goutal, Alibert et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme B...C...et M. F...G...la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. …………………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code civil ;

- le code de la construction et de l’habitation ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Le Guillou, premier conseiller,

- les conclusions de M. Ferrari, rapporteur public,

- les observations de Me Bruno Bouyer de la SCP Bouyer-Bourgeois, représentant Mme B... C...et M.G...,

- et celles de Me Charline Hatinguais de la SELARL Goutal, Alibert et associés, représentant la commune d’Eymet.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E...B...C...et M. F...G...sont propriétaires en indivision, depuis le 30 novembre 2006, d’un immeuble situé au n° 42 rue du Couvent à Eymet (Dordogne). Le 3 mars 2015, une partie du mur mitoyen séparant leur parcelle de la parcelle située au n° 40 de la même rue s’est effondrée. Puis, dans la nuit du 18 au 19 août 2015, une partie de la charpente de l’immeuble sis n° 40 rue du Couvent s’est effondrée. Par arrêté de péril du 20 août 2015, le maire d’Eymet a imposé aux occupants de l’immeuble de Mme B...C...et M. G...de quitter les lieux. A compter du 24 septembre 2015, la commune d’Eymet a fait réaliser des travaux de sécurisation de l’immeuble situé au n° 40 rue du Couvent, qui ont nécessité d’entrer dans l’immeuble situé au n° 42 appartenant à Mme B...C...et M.G.... Par la requête n° 1802719, ces derniers demandent au tribunal de condamner la commune d’Eymet à leur verser la somme de 96 353,84 euros indexée sur l’indice INSEE du coût de la construction en réparation du préjudice matériel, la somme de 650 euros par mois depuis le 20 août 2015 jusqu’à la date de leur retour dans leur maison d’habitation en réparation du préjudice de jouissance, les sommes de 9 030 euros et 350 euros par mois jusqu’au jour de la remise en location de l’appartement n° 1 en réparation du préjudice économique et la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice moral subis du fait des dommages causés à leur propriété immobilière. Par la requête n° 1804368, ils demandent au juge des référés de condamner la commune d’Eymet à leur verser, à titre de provision, la somme de 100 000 euros.

2. Les requêtes susvisées n° 1802719 et n° 1804368, présentées pour Mme B...C...et M.G..., présentent à juger les mêmes questions et ont fait l’objet d’une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement.

3. Le second alinéa de l’article 32 du décret du 27 février 2015 relatif au Tribunal des conflits et aux questions préjudicielles dispose que : « Lorsqu’une juridiction de l’ordre judiciaire ou de l’ordre administratif a, par une décision qui n’est plus susceptible de recours, décliné la compétence de l’ordre de juridiction auquel elle appartient au motif que le litige ne ressortit pas à cet ordre, toute juridiction de l’autre ordre, saisie du même litige, si elle estime que le litige ressortit à l’ordre de juridiction primitivement saisi, doit, par une décision motivée qui n’est susceptible d’aucun recours même en cassation, renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence ainsi soulevée et surseoir à toute procédure jusqu’à la décision du tribunal ».

4. Mme B...C...et M. G...demandent la réparation des dommages causés à leur immeuble par les effondrements des 3 mars et 18-19 août 2015 et par les travaux de sécurisation de l’immeuble voisin entrepris par la commune d’Eymet en septembre 2015. Il ressort de leurs écritures qu’ils recherchent la responsabilité de la commune d’Eymet, non en raison de la mauvaise exécution par le maire d’Eymet de ses pouvoirs de police des édifices menaçant ruine, mais en raison, d’une part, du mauvais entretien de l’immeuble situé au n° 40 de la rue du Couvent qui était, au plus tard à compter du 24 février 2015, date de son incorporation dans le domaine de la commune d’Eymet, la propriété de celle-ci et, d’autre part, de la mauvaise exécution des travaux engagés par la commune en septembre 2015. Or, il résulte de l’instruction que l’immeuble situé au n° 40 de la rue du Couvent, qui n’est affecté ni à l’usage direct du public ni à un service public, appartient au domaine privé de la commune d’Eymet. Par ailleurs, les travaux que celle-ci a entrepris en septembre 2015 ont été réalisés à titre conservatoire en sa qualité de propriétaire de cet immeuble, et non par le maire dans le cadre de ses pouvoirs d’exécution d’office des travaux imposés au propriétaire d’un immeuble menaçant ruine lorsque ce propriétaire est défaillant. Ainsi ces travaux, exécutés pour la gestion d’un bien faisant partie du domaine privé de la commune d’Eymet, n’ont pas le caractère de travaux publics. Dès lors, Mme C...C...et M. G...ne recherchent pas la responsabilité de la commune d’Eymet sur le fondement des dommages de travaux publics, mais sur celui de la faute que celle-ci aurait commise dans l’entretien de son domaine privé. Dans ces conditions et en l’état du dossier, il apparaît que le litige ressortit à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire.

5. Toutefois, la cour d’appel de Bordeaux, saisie par Mme B...C...et M. G...en appel d’un jugement du tribunal de grande instance de Bergerac en date du 3 novembre 2017 déclinant la compétence des tribunaux de l’ordre judiciaire a, par un arrêt du 3 avril 2018 qui n’est plus susceptible de recours, confirmé ce jugement.

6. Il convient, dans ces conditions et par application de l’article 32 du décret du 27 février 2015, de renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence ainsi soulevée et de surseoir à toute procédure jusqu’à la décision de ce tribunal

D E C I D E :

Article 1er : Les affaires sont renvoyées au Tribunal des conflits.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur les requêtes n° 1802719 et n° 1804368 de Mme B...C...et M. G...jusqu’à ce que le Tribunal des conflits ait tranché la question de savoir quel est l’ordre de juridictions compétent pour statuer sur ces requêtes.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme E...B...C..., à M. F...G...et à la commune d’Eymet.