Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 13 septembre 2017, et un mémoire enregistré le 29 octobre 2018, M. et Mme C..., représentés par le cabinet Paul Avocats, demandent au tribunal :

1°) d’annuler la délibération du 4 juillet 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Cussac-Fort-Médoc a approuvé le projet d’Aire de Mise en Valeur de l’Architecture et du Patrimoine (AVAP) du Verrou de l’Estuaire ;

2°) de mettre à la charge de la Commune de Cussac-Fort-Médoc une somme de 3 000 euros en application de l’article L. 761 1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 avril 2018, la commune de Cussac-Fort-Médoc conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance du 2 novembre 2018, la clôture de l’instruction a été fixée au 20 novembre 2018.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du patrimoine ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l’urbanisme ;

- le code de l’environnement ;

- la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

- le rapport de Mme Pruche-Maurin,

- les conclusions de M. Vaquero, rapporteur public,

- les observations de Me Paul, pour le cabinet Paul Avocats, représentant M. et Mme C..., et de Me Bourié, pour la SELARL Boissy Avocats, représentant la commune de Cussac-Fort-Médoc.

Une note en délibéré, enregistrée le 12 février 2019, a été produite pour M. et Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Par délibérations du 30 mars 2006 et du 28 avril 2009, les communes de Cussac-Fort-Médoc et Blaye ont mis à l’étude la création de la Zone de Protection du Patrimoine Architectural Urbain et Paysager (ZPPAUP) du Verrou de l’Estuaire. Par délibérations du 13 avril 2011 et du 26 juin 2012 le projet de ZPPAUP a été remplacé par le projet de création de l’Aire de Mise en Valeur de l'Architecture et du Patrimoine (AMVAP) du Verrou de l’Estuaire. Par délibérations des 3 et 9 décembre 2014, les deux communes ont arrêté le projet d'AMVAP. Par un arrêté du 31 août 2016, le maire de Blaye a prescrit l’enquête publique, qui s’est déroulée du 10 octobre au 9 novembre 2016. Par délibération du 4 juillet 2017, le conseil municipal de la commune de Cussac-Fort-Médoc a approuvé le projet d’aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine du Verrou de l’Estuaire. M. et Mme C..., exploitants agricoles et propriétaires de plusieurs terrains situés aux lieux-dits Vieux Cussac et La Taste-Capeyron à Cussac-Fort-Médoc, demandent par la présente requête, l’annulation de cette délibération.

Sur les fins de non-recevoir :

2. En premier lieu, aux termes de l’article L. 642-1 du code du patrimoine dans sa version applicable au litige : « Une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine peut être créée à l'initiative de la ou des communes ou d'un établissement public de coopération intercommunale lorsqu'il est compétent en matière d'élaboration du plan local d'urbanisme, sur un ou des territoires présentant un intérêt culturel, architectural, urbain, paysager, historique ou archéologique. (…) ». Aux termes de l’article L. 642-3 du même code : « La mise à l'étude de la création ou de la révision de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine est décidée par délibération de l'organe délibérant de l'autorité mentionnée au premier alinéa de l'article L. 642-1. (…) / Le projet de création ou de révision de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine est arrêté par délibération de cette autorité. (…) / Après accord du préfet, l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine est créée ou révisée par délibération de l'autorité mentionnée au premier alinéa de l'article L. 642-1 du présent code. (…) ». Aux termes de l’article D. 642 1 du même code : « La décision de mettre à l'étude un projet d'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine en application du premier alinéa de l'article L. 642-3 est prise sur délibérations concordantes du ou des conseils municipaux de la ou des communes concernées ou sur délibération de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme (…) ». Aux termes de l’article D. 642-5 du même code : « Pour l'application du deuxième alinéa de l'article L. 642-3, le projet de création ou de révision d'une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine est, à l'issue de l'étude prévue à la section 1, soumis aux délibérations concordantes du ou des conseils municipaux de la ou des communes concernées ou à la délibération de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme. » Enfin aux termes de l’article D. 642-10 du même code : « Les délibérations prises par le ou les conseils municipaux de la ou des communes concernées ou par l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale pour l'application du sixième alinéa de l'article L. 642-3, portant création ou révision de l'aire, mentionnent l'accord du préfet. / Les modalités de publicité de la délibération sont celles prévues à l'article D. 642-1. (…) / La délibération produit ses effets juridiques dès l'exécution de la dernière formalité de publicité, la date à prendre en compte pour l'affichage étant celle du premier jour où il est effectué. ».

3. Il résulte tant des dispositions précitées que de l’objet même d’une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine, lorsque celle-ci couvre le territoire de plusieurs communes, que sa création doit être effectuée par délibérations concordantes des communes concernées. Toutefois, aucune disposition législative ou réglementaire n’impose au requérant qui veut contester l'AMVAP de contester l'ensemble des délibérations approuvant celle-ci. Par suite, la fin de non-recevoir soulevée par la commune et tirée de ce que M. et MmeC..., habitants de Cussac-Fort-Médoc, auraient également dû diriger leur recours contre la délibération du 27 juin 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Blaye a approuvé le projet d’aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine du Verrou de l’Estuaire doit être écartée.

4. En second lieu, si M. et Mme C...ne produisent pas de titres de propriété au soutien de leur requête, il n’est pas contesté par la commune que ceux-ci résident sur son territoire où ils sont exploitants agricoles. Par suite, la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir des époux C...doit être écartée.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

5. En premier lieu, aux termes des dispositions de l’article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales : « Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, au domicile des conseillers municipaux ou, s'ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée ». Aux termes des dispositions de l’article L. 2121-13 du même code : « Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ». Il ressort des pièces du dossier que la convocation à la séance du conseil municipal du 27 juin 2017 comportait l’ordre du jour, qui comprenait notamment l’approbation de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine du Verrou de l’Estuaire. Il ressort également des pièces produites que la convocation était accompagnée d’un envoi concomitant par mail d’un ensemble de pièces concernant ledit projet d'AMVAP. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions précitées auraient été méconnues manque en fait et doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l’article L. 642-3 du code du patrimoine, dans sa rédaction applicable en l’espèce : « La mise à l'étude de la création ou de la révision de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine est décidée par délibération de l'organe délibérant de l'autorité mentionnée au premier alinéa de l'article L. 642-1. La délibération mentionne les modalités de la concertation prévue à l'article L. 103-3 du code de l'urbanisme (…) Il fait l'objet d'une enquête publique conduite par les autorités compétentes concernées (…) ». Aux termes de l’article D. 642-8 du même code : « A l'issue de la consultation mentionnée à l'article D. 642-7, l'enquête publique prévue aux articles L. 642-3 et L. 642-4 est réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement ». Aux termes de l’article L. 103-6 du code de l’urbanisme : « (…) Lorsque le projet fait l'objet d'une enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement, le bilan de la concertation est joint au dossier de l'enquête ». Enfin, aux termes de l’article L. 123-6 du code de l’environnement : « Lorsque la réalisation d'un projet, plan ou programme est soumise à l'organisation de plusieurs enquêtes publiques dont l'une au moins en application de l'article L. 123-2, il peut être procédé à une enquête unique régie par le présent chapitre, dès lors que les autorités compétentes désignent d'un commun accord celle qui sera chargée d'ouvrir et d'organiser cette enquête. Le dossier soumis à enquête publique unique comporte les pièces ou éléments exigés au titre de chacune des enquêtes initialement requises et une note de présentation non technique du projet, plan ou programme (…) ».

7. Il n’est pas contesté qu’il a été procédé à une enquête unique au titre du projet d’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine et au titre de la modification du périmètre de protection des monuments historiques. Si M. et Mme C...soutiennent que le bilan de la concertation n’a pas été joint au dossier d’enquête publique, il ressort des pièces du dossier que le dossier d’enquête publique comporte la délibération du 3 décembre 2014 de la commune de Cussac-Fort-Médoc qui arrête le projet d’AMVAP, mentionne que les modalités de la concertation ont été instituées par la délibération n° 2014-002, et tire le bilan de la concertation. Par suite, le moyen tiré de ce que le bilan de la concertation n’a pas été joint au dossier d’enquête publique manque en fait et doit être écarté.

8. En troisième lieu, aux termes de l’article L. 642-5 du code du patrimoine, dans sa rédaction applicable en l’espèce : « Une instance consultative, associant : / - des représentants de la ou des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale intéressés ; / - le préfet ou son représentant ; / - le directeur régional de l'environnement, de l'aménagement et du logement ou son représentant ; / - le directeur régional des affaires culturelles ou son représentant ; / - ainsi que des personnes qualifiées, d'une part, au titre de la protection du patrimoine et, d'autre part, au titre des intérêts économiques concernés, / est constituée par délibération de l'organe délibérant de l'autorité mentionnée au premier alinéa de l'article L. 642-1 lors de la mise à l'étude de la création ou de la révision d'une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine. / Cette instance consultative a pour mission d'assurer le suivi de la conception et de la mise en œuvre des règles applicables à l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine. Dans le cadre de l'instruction des demandes d'autorisation de travaux, elle peut être consultée par l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation sur tout projet d'opération d'aménagement, de construction ou de démolition, notamment lorsque celui-ci nécessite une adaptation mineure des dispositions de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine ». Aux termes de l’article D. 642-2 du même code : « L'instance consultative prévue à l'article L. 642-5, dénommée commission locale de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine, comporte un nombre maximum de quinze membres. / Le nombre des représentants de la ou des communes ou de l'établissement public de coopération intercommunale mentionnés à l'article D. 642-1 ne peut être inférieur à cinq. / Les personnes qualifiées, désignées par les délibérations concordantes mentionnées au même article sont au nombre de quatre dont deux choisies au titre du patrimoine culturel ou environnemental local et deux choisies au titre d'intérêts économiques locaux. / Un maire ou un président d'établissement public de coopération intercommunale, désigné en son sein par la commission, assure la présidence. En cas d'absence ou d'empêchement, il peut donner mandat à un autre membre de l'instance titulaire d'un mandat électif. / L'architecte des Bâtiments de France assiste avec voix consultative aux réunions de la commission. / La commission délibère à la majorité des voix. En cas de partage des voix, la voix du président est prépondérante. / Elle arrête un règlement intérieur ».

9. Les requérants soutiennent que les modalités de création de la commission locale de l’aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine n’ont pas été respectées, notamment que sa création aurait été tardive, que les viticulteurs en auraient été exclus, qu’aucun président n’aurait été désigné et qu’aucun règlement intérieur n’aurait été établi. S’agissant du moyen pris en sa première branche, il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal de Cussac-Fort-Médoc a décidé par délibération du 13 avril 2011 de substituer à la ZPPAUP en cours d’adoption une aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine. Par délibération du 13 février 2013, la commune de Cussac-Fort-Médoc a défini les modalités de création et de composition de la commission locale, et nommé quatre membres en tant que représentants de la commune. Le compte-rendu de la séance du conseil municipal au cours de laquelle a été adoptée cette délibération, produit par la commune, indique que le maire a adressé un courrier à une association de défense du patrimoine et au syndicat viticole pour les inviter à désigner un représentant au sein de leurs membres. Il ressort également des pièces du dossier que la réunion de travail du 6 décembre 2013 a eu pour objet de finalement installer la commission locale. Ainsi, la mise en place de l’instance consultative n’ayant pas été concomitante à la mise à l’étude de la création de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine, elle a été tardive. Toutefois, cette irrégularité n’est pas de nature à avoir exercé une influence sur le sens de la décision attaquée, ni à avoir privé les intéressés d’une garantie, dès lors que l’instance consultative pouvait remplir son office, et notamment donner un avis sur le projet soumis aux conseils municipaux de Blaye et Cussac-Fort-Médoc et à la commission régionale du patrimoine et des sites, et sur le projet après enquête publique. Par suite, le moyen pris en sa première branche doit être écarté.

10. S’agissant du moyen pris en sa deuxième branche, il ressort des pièces du dossier que M. C...a été désigné membre de la commission locale en sa qualité de représentant du Syndicat viticole par la délibération susmentionnée du 9 avril 2014. Siégeait donc au sein de cette commission une personne qualifiée « au titre des intérêts économiques concernés », conformément aux dispositions précitées de l’article L. 642-5 du code du patrimoine. Aucune disposition législative ni réglementaire n’imposait par ailleurs à la commune de Cussac-Fort-Médoc de consulter spécifiquement le monde viticole. En tout état de cause, les professionnels concernés avaient la possibilité de s’exprimer par le biais de leur représentant au sein de la commission locale, M.C..., et lors de l’enquête publique. Par suite, le moyen pris en sa deuxième branche sera écarté.

11. S’agissant du moyen pris en sa troisième branche, il ressort des pièces du dossier, et n’est pas contesté par la commune, qu’aucun président de la commission n’a été formellement désigné, et qu’aucun règlement intérieur n’a été arrêté alors qu'il résulte des dispositions précitées de l’article D. 642-2 du code du patrimoine que ces formalités sont obligatoires. Il ne ressort cependant pas des pièces du dossier que ces vices aient été susceptibles d’exercer une influence sur le sens de la décision prise ou qu’ils aient privé les intéressés d’une garantie. Par suite, cette branche du moyen doit également être écartée.

12. En quatrième lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la consultation de l’instance consultative prévue par les dispositions des articles L. 642-5 et L. 642-6 du code du patrimoine ne revêt qu’un caractère facultatif. En outre, et en tout état de cause, les mentions d’une délibération font foi jusqu’à preuve du contraire. Or, les délibérations des 3 et 9 décembre 2014 des communes de Cussac-Fort-Médoc et Blaye arrêtant le projet d’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine du Verrou de l’Estuaire mentionnent un avis favorable de la commission locale en date du 30 octobre 2014. Par suite, le moyen tiré de ce que la commission locale n’aurait pas été consultée doit être écarté.

13. En cinquième lieu, aux termes de l’article L. 642-1 du code du patrimoine, dans sa rédaction applicable en l’espèce : «Une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine peut être créée à l'initiative de la ou des communes ou d'un établissement public de coopération intercommunale lorsqu'il est compétent en matière d'élaboration du plan local d'urbanisme, sur un ou des territoires présentant un intérêt culturel, architectural, urbain, paysager, historique ou archéologique. / Elle a pour objet de promouvoir la mise en valeur du patrimoine bâti et des espaces dans le respect du développement durable. Elle est fondée sur un diagnostic architectural, patrimonial et environnemental, prenant en compte les orientations du projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme, afin de garantir la qualité architecturale des constructions existantes et à venir ainsi que l'aménagement des espaces. / L'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine a le caractère de servitude d'utilité publique. ». Aux termes de l’article L. 642-2 du même code : « Le dossier relatif à la création de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine comporte : / - un rapport de présentation des objectifs de l'aire. Ces objectifs sont fondés sur le diagnostic mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 642-1 et déterminés en fonction du projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme s'il est entré en vigueur(…)». Aux termes de l’article D. 642-4 du même code : « Le diagnostic prévu au deuxième alinéa de l'article L. 642-1 constitue la première étape de l'étude. / Il porte sur le territoire de l'aire et comprend : / 1° Une partie relative au patrimoine architectural, urbain, paysager, historique et archéologique permettant de déterminer l'intérêt, les caractéristiques et l'état de ce patrimoine ; elle comporte une analyse du territoire concerné, à différentes échelles, portant notamment sur : / a) La géomorphologie et la structure paysagère, l'évolution et l'état de l'occupation bâtie et des espaces ; / b) L'histoire et les logiques d'insertion dans le site, des implantations urbaines et des constructions, la morphologie urbaine, les modes d'utilisation des espaces et des sols ainsi que l'occupation végétale ; / c) La qualité architecturale des bâtiments ainsi que l'organisation des espaces ; / 2° Une partie relative à l'environnement comportant notamment : / a) Une analyse des tissus bâtis et des espaces au regard de leur capacité esthétique et paysagère à recevoir des installations nécessaires à l'exploitation des énergies renouvelables ; / b) Une analyse de l'implantation des constructions, des modes constructifs existants et des matériaux utilisés, précisant au besoin l'époque de construction des bâtiments, permettant de déterminer des objectifs d'économie d'énergie. / Cette partie reprend et complète, en tant que de besoin, l'analyse environnementale figurant au plan local d'urbanisme. / A défaut de plan local d'urbanisme, elle comporte, en outre, une analyse de l'état initial de l'environnement dans le territoire de l'aire. »

14. Si le rapport de présentation mentionne une synthèse du diagnostic architectural, patrimonial et environnemental, il ressort des pièces du dossier que, loin d’être synthétique, le diagnostic qui y est présenté procède à une analyse du patrimoine architectural, urbain et paysager du Verrou de l’Estuaire et des communes de Cussac-Fort-Médoc et Blaye, ainsi qu’à une analyse environnementale du site, conformément aux dispositions précitées du code du patrimoine, lesquelles n’imposent pas à la collectivité porteuse du projet d’aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine de reprendre intégralement le diagnostic dans le rapport de présentation. En outre, la circonstance que la circulaire du 2 mars 2012 relative aux aires de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine, invoquée par les requérants, évoque une reprise intégrale du diagnostic au rapport de présentation est inopérante. Par suite, le moyen tiré de ce que le rapport de présentation ne comporte pas de diagnostic architectural, patrimonial et environnemental manque en fait et doit être écarté.

15. En sixième lieu, il résulte des dispositions précitées de l’article L. 642-2 du code du patrimoine que le règlement de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine comprend des prescriptions parmi lesquelles certaines doivent être relatives à la qualité architecturale des constructions nouvelles ou des aménagements de constructions existantes ainsi qu'à la conservation ou à la mise en valeur du patrimoine bâti et des espaces naturels ou urbains, à l'intégration architecturale et à l'insertion paysagère des constructions, ouvrages, installations ou travaux visant tant à l'exploitation des énergies renouvelables ou aux économies d'énergie qu'à la prise en compte d'objectifs environnementaux. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, ces dispositions n’interdisent pas aux auteurs du règlement d’édicter des prescriptions relatives à l’usage des matériaux. En l’espèce, l’article A2.5.5.1 du règlement de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine du Verrou de l’Estuaire entend réglementer les matériaux utilisés en toiture. Ce faisant, il ne fait qu’instaurer des prescriptions en matière architecturale, conformément aux dispositions précitées. Par suite, en approuvant ledit règlement, la commune n’a pas méconnu les dispositions de l’article L. 642-2 du code du patrimoine.

16. En septième lieu, les requérants soutiennent que la commune de Cussac-Fort-Médoc a commis une erreur manifeste d’appréciation quant aux enjeux protégés par le secteur A2 de l’AMVAP, quant à la classification d’habitats remarquables et la qualité urbaine de certains immeubles de Cussac-le-Vieux et quant à l’intégration, de manière générale, dans le périmètre de l’AMVAP de cette partie ancienne de la commune. Il ressort d’une part des pièces du dossier, et notamment du règlement de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine du Verrou de l’Estuaire, que le secteur A2 correspond, sur la commune de Cussac-Fort-Médoc, à l’ancien bourg, appelé Cussac-le-Vieux et à l’accès terrestre au Fort-Médoc et recouvre, selon les termes mêmes du règlement, « les ensembles bâtis et urbains les plus anciens et les plus cohérents ». Il ressort d’autre part, du rapport de présentation, que l’un des enjeux de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine est de reconnaître et conserver dans la mesure du possible les bâtiments et vestiges présents sur les sites, dans un objectif de protection du patrimoine de la vallée et de protéger les paysages formant l’écrin paysager des ouvrages militaires du Verrou de l’Estuaire, œuvre de Vauban, dont fait partie intégrante l’ancien bourg de Cussac. Ainsi, et alors que le commissaire enquêteur a émis un avis favorable sur le projet en date du 9 décembre 2016, la circonstance que seuls deux immeubles de l’ancien bourg de Cussac soient qualifiés d’immeubles remarquables à conserver et à restaurer n’est pas de nature à remettre en cause le classement de ce secteur dans le périmètre de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine du Verrou de l’Estuaire. En effet il ressort des pièces du dossier que bien que ne comportant que peu de bâtis exceptionnels, les immeubles du lieu-dit Cussac-le-Vieux forment un ensemble urbain ancien homogène ayant conservé une cohérence. Enfin, la circonstance qu’il n’existe aucune covisibilité entre Cussac-le-Vieux et le Fort-Médoc est indifférente s’agissant de son classement au sein de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine du Verrou de l’Estuaire, dès lors que ce territoire présente un intérêt historique, urbain, architectural et paysager suffisant. Dans ces conditions, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la commune a classé l’ancien bourg de Cussac dans le périmètre de l’AMVAP en secteur A2 comportant des habitats qualifiés de remarquables ou des bâtiments présentant une qualité urbaine à préserver.

17. En huitième lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment du règlement de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine du Verrou de l’Estuaire, que le secteur A3 du plan de zonage est constitué par le patrimoine viticole et paysager sensible, peu ou pas urbanisé, « domaines et vignobles, bâtiments, parcelles cultivées et espaces naturels » correspondant principalement aux terrasses alluviales situées de part et d’autre de l’estuaire. Si les requérants soutiennent d’une part, que la commune a commis une erreur d’appréciation en classant en secteur A3 de l’AMVAP la parcelle cadastrée section ZA n° 119, dont ils sont propriétaires et située au lieu dit « La Taste », il ressort toutefois des pièces du dossier que le projet de règlement du plan local d’urbanisme en cours d’élaboration à la date de la décision attaquée, prévoit de maintenir le classement de cette parcelle en zone agricole. En outre, et contrairement ce que soutiennent les requérants, la circonstance qu’il n’y ait aucune covisibilité avec le Fort-Médoc est indifférente s’agissant du classement en aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine. Ainsi en classant cette parcelle laissée à l’état naturel et située dans le périmètre de l’aire d’appellation d’origine contrôlée du Haut Médoc en secteur A3 de l’AMVAP, la commune n’a pas commis d’erreur d’appréciation.

18. Les requérants soutiennent d’autre part, que la commune a également commis une erreur manifeste d’appréciation en classant les parcelles situées au lieu dit « Capeyron », au nord de la parcelle ZA 119, dont ils sont propriétaires, en secteur A3 de l’AMVAP. Il ressort des pièces du dossier et notamment des photographies et plans fournis que ces parcelles qui supportent deux maisons d’habitation sont urbanisées et situées en continuité du bourg actuel de Cussac. Dès lors, elles ne peuvent correspondre à la définition du secteur A3 précité. Par suite, en classant ces parcelles en secteur A3 de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine du Verrou de l’Estuaire, la commune de Cussac-Fort-Médoc a commis une erreur d’appréciation.

19. En neuvième lieu, alors qu’il est constant d’une part que le Château de Bernones est classé monument historique depuis 2012, son état de délabrement qui n’est pas contesté par la commune, ne fait pas obstacle, contrairement ce que soutiennent les requérants, à son intégration dans le périmètre de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine du Verrou de l’Estuaire, qui a précisément pour objet la préservation du patrimoine viticole et de la qualité architecturale des hameaux et domaines viticoles. A ce titre, les châteaux de Lamothe, Le Raux, et le hameau de Lauga sont également inclus dans le périmètre de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine. Ainsi, la commune n’a pas commis d’erreur d’appréciation quant à la prise en compte du Château de Bernones dans le périmètre de l’AMVAP. D’autre part, les requérants ne sauraient utilement soutenir dans la présente instance dirigée à l’encontre de la délibération approuvant l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine du Verrou de l’Estuaire que la réduction du périmètre de protection du Château de Bernones est entaché d’erreur manifeste d’appréciation, ce moyen visant la délibération du 11 octobre 2017 approuvant le périmètre de protection modifiée.

20. En dernier lieu, il résulte des dispositions précitées de l’article L. 642-1 du code du patrimoine qu’une aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine peut être créée sur un territoire présentant un intérêt culturel, architectural, urbain, paysager historique ou archéologique, dans le but de promouvoir le patrimoine dans le respect du développement durable. Il ne ressort d’aucune disposition législative ou réglementaire que la servitude d’utilité publique ainsi instituée doive être cohérente avec le périmètre d’une surface de protection instituée par l’UNESCO. Par suite, le moyen tiré de ce que le territoire de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine du Verrou de l’Estuaire est disproportionné au regard du périmètre de protection UNESCO doit être écarté.

21. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...sont fondés à demander l’annulation de la délibération du 4 juillet 2017, seulement en tant qu’elle classe en secteur A3 de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine du Verrou de l’Estuaire les parcelles bâties situées au lieu dit « Capeyron ».

Sur les frais liés au litige :

22. Les dispositions de l’article L. 761 1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme C..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Cussac-Fort-Médoc demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. et Mme C...présentées sur le fondement des dispositions de l’article L. 761 1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La délibération du 4 juillet 2017 est annulée en tant qu’elle classe en secteur A3 de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine du Verrou de l’Estuaire les parcelles bâties de M. et Mme C..., situées au lieu dit « Capeyron ».

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. et Mme C... et à la commune de Cussac-Fort-Médoc.