Vu la requête, enregistrée le 13 septembre 2013 au greffe du tribunal administratif de Bordeaux, présentée par M. B... A..., demeurant... ; M. A... demande au tribunal de condamner l’Etat à lui verser une somme de 1 856,57 euros en réparation des préjudices subis du fait de l’attribution d’une allocation complémentaire de fonction à un taux supérieur à celui qui devait lui être appliqué sur une durée de 27 mois du 1er novembre 2010 au 31 janvier 2013 ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 1er août 2014, présenté par le ministre des finances et des comptes publics qui conclut au rejet de la requête ;

Vu le mémoire complémentaire enregistré le 25 août 2014, présenté par M. A..., qui conclut aux mêmes fins que la requête ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ;

Vu la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 novembre 2014 :

- le rapport de Mme Lipsos, conseiller,

- et les conclusions de M. Basset, rapporteur public ;

1. Considérant, d’une part, que, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l’administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ; qu’une décision administrative explicite accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l’administration avait l’obligation de refuser cet avantage ; qu’en revanche, n’ont pas cet effet les mesures qui se bornent à procéder à la liquidation de la créance née d’une décision prise antérieurement ; que, pour l’application de ces règles pour la détermination de la rémunération des agents publics, le maintien du versement d’un avantage financier ne peut être assimilé à une décision accordant un avantage financier et constitue une simple erreur de liquidation non créatrice de droits ; qu’il appartient à l’administration de corriger cette erreur et de réclamer le reversement des sommes payées à tort, sans que l’agent intéressé puisse se prévaloir de droits acquis à l’encontre d’une telle demande de reversement ;

2. Considérant qu’il résulte de l’instruction, que M. A... a, lors de son passage au 3ème échelon du grade de contrôleur principal des douanes et droits indirects, continué de percevoir une allocation complémentaire fonctionnelle mensuelle de 257,87 euros au lieu de 190,62 euros, du 1er novembre 2010 au 31 janvier 2013 ; que le maintien de ces versements a constitué une erreur de liquidation ; qu’il appartenait à l’administration de corriger cette erreur et de demander à l’intéressé le remboursement des sommes indûment perçues ;

3. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administration, dans sa rédaction issue de la loi du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 publiée au Journal officiel de la République française du 29 décembre 2011 : « Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive. / Toutefois, la répétition des sommes versées n'est pas soumise à ce délai dans le cas de paiements indus résultant soit de l'absence d'information de l'administration par un agent de modifications de sa situation personnelle ou familiale susceptibles d'avoir une incidence sur le montant de sa rémunération, soit de la transmission par un agent d'informations inexactes sur sa situation personnelle ou familiale. / Les deux premiers alinéas ne s'appliquent pas aux paiements ayant pour fondement une décision créatrice de droits prise en application d'une disposition réglementaire ayant fait l'objet d'une annulation contentieuse ou une décision créatrice de droits irrégulière relative à une nomination dans un grade lorsque ces paiements font pour cette raison l'objet d'une procédure de recouvrement. » ; qu’aux termes de l’article 2224 du code civil, dans sa rédaction issue de l’article 1er de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. » ; qu’aux termes de l’article 2222 du même code, dans sa rédaction issue de la même loi : « (…) / En cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure » ; que selon l’article 1er du code civil : « Les lois et, lorsqu'ils sont publiés au Journal officiel de la République française, les actes administratifs entrent en vigueur à la date qu'ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication. (…). » ;

4. Considérant qu’il résulte de ces dispositions combinées que pour l’exercice des actions relatives aux créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents personnelles ou mobilières, la loi du 28 décembre 2011 susmentionnée a substitué à la prescription quinquennale prévue antérieurement par l’article 2224 du code civil une prescription biennale à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, sous réserve que la durée totale du délai de prescription applicable aux créances nées antérieurement n’excède pas une durée totale de cinq ans ; qu’il résulte de l’instruction que le délai de prescription de deux ans des créances nées du versement à M.A..., du 1er novembre 2010 au 30 décembre 2011, de rémunérations indues, courait à compter du 30 décembre 2011 ; que lorsque l’administration a prélevé les sommes correspondant à ces créances, au mois d’avril 2013, ce délai n’était pas prescrit et ne dépassait pas la limite de cinq années prévues par les dispositions antérieures du code civil ; que les créances nées du versement du 31 décembre 2011 au 31 janvier 2013, n’étaient pas davantage prescrites, lorsque l’administration a prélevé les sommes correspondantes, au mois d’avril 2013, en application du délai de deux ans susmentionné de la loi du 12 avril 2000 ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des règles de prescription doit être écarté ;

5. Considérant, toutefois, que la perception prolongée par M. A...pendant vingt-sept mois, entre le 1er novembre 2010 et le 31 janvier 2013 de l’allocation complémentaire de fonction d’un montant de 257,87 euros est imputable à la carence de l’administration ; que compte tenu notamment de la durée pendant laquelle cette carence s’est prolongée et de ce que M. A...fait valoir, sans être contesté, que le prélèvement en une seule fois des sommes trop perçues lui a causé des difficultés financières, quand bien même le montant prélevé par l’administration sur son traitement n’était pas supérieur au montant de la quotité saisissable, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par le requérant en lui accordant à ce titre une indemnité de 600 euros ;

6. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à demander la condamnation de l’Etat à lui verser une indemnité de 600 euros en réparation de ses préjudices ;

D E C I D E :

Article 1er : L’Etat est condamné à verser à M. A...la somme de 600 euros à titre d’indemnité.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. B... A..., au ministre des finances et des comptes publics et au directeur interrégional des douanes et droits indirects de Nantes.