Vu la requête, enregistrée le 15 juin 2012, présentée par M. A... G..., mandataire des requérants, demeurant..., l’association TRANS’CUB, dont le siège est ..., M. F... B..., demeurant ... et M. C... E..., demeurant... ; les requérants demandent au tribunal :

- d’annuler la délibération n° 2009-0045 du 16 janvier 2009 par laquelle le conseil de la communauté urbaine de Bordeaux a autorisé son président à engager la procédure de demande de subvention dans le cadre de l’appel à projets « Transports urbains » ;

- d’annuler la délibération n° 2009-0708 du 6 novembre 2009 par laquelle le conseil de la communauté urbaine de Bordeaux a arrêté le dossier définitif du projet de création de la ligne « tram-train du Médoc », d’extension des lignes A, B et C et de création de la ligne D du tramway ;

- d’annuler la délibération n° 2011-0344 du 27 mai 2011 par laquelle le conseil de la communauté urbaine de Bordeaux a décidé de requérir auprès du préfet de la Gironde l’ouverture de l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique de la création de la ligne « tram-train du Médoc » ;

- d’annuler l’arrêté du préfet de la Gironde du 23 mars 2012 déclarant d’utilité publique au profit de la communauté urbaine de Bordeaux les travaux nécessaires à la création de la ligne « tram-train du Médoc » de la 3ème phase du tramway de l’agglomération bordelaise et emportant approbation des nouvelles dispositions du plan local d'urbanisme de la communauté urbaine de Bordeaux ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu le mémoire enregistré le 16 octobre 2012, présenté par le préfet de la Gironde, qui conclut au rejet de la requête ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu le mémoire et les pièces complémentaires, enregistrés le 21 décembre 2012, présentés par les requérants qui concluent à l’annulation de l’arrêté du 23 mars 2012 du préfet de la Gironde « par exception d’illégalité de la délibération du 6 novembre 2009 » du conseil de la communauté urbaine de Bordeaux, par les mêmes moyens que la requête ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu le mémoire enregistré le 7 janvier 2013, présenté par la communauté urbaine de Bordeaux, représentée par son président, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme de 150 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………………

Vu le mémoire, enregistré le 5 février 2013, présenté par les requérants, qui demandent au tribunal de mettre en demeure la communauté urbaine de Bordeaux de produire sous 15 jours les documents et éléments chiffrés permettant de justifier les calculs du taux de rentabilité interne et du bénéfice actualisé mentionnés dans le dossier d’enquête publique ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 novembre 2013, présenté par les requérants, qui concluent aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

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Vu le mémoire, enregistré le 20 décembre 2013, présenté pour la communauté urbaine de Bordeaux, par le cabinet Coudray, avocats, qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens et porte à la somme de 3 500 euros ses conclusions au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu le mémoire, enregistré le 23 janvier 2014, présenté par les requérants, qui concluent aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

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Vu le mémoire, enregistré le 25 mars 2014, présenté par le préfet de la Gironde, qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

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Vu le mémoire, enregistré le 25 juillet 2014, présenté pour la communauté urbaine de Bordeaux, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

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Vu le mémoire, enregistré le 5 septembre 2014, présenté par les requérants qui concluent aux mêmes fins que précédemment et demandent au tribunal au tribunal d’ordonner, le cas échéant, une expertise ;

Vu l’ordonnance en date du 5 août 2014 fixant la clôture d’instruction au 19 septembre 2014 ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 septembre 2014, présenté par les requérants ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 septembre 2014, présenté pour la communauté urbaine de Bordeaux ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 octobre 2014, présentée par les requérants ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 22 octobre 2014, présentée pour la communauté urbaine de Bordeaux ;

Vu la décision attaquée et les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l’environnement ;

Vu le code des transports ;

Vu le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ;

Vu le code de l’urbanisme ;

Vu la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 et le décret n°84-617 du 17 juillet 1984 pris pour l’application de l’article 14 de cette loi ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2014 :

- le rapport de M. Pouzoulet, président ;

- les conclusions de M. Vaquero, rapporteur public ;

- les observations de M.G...;

- les observations de M.E... ;

- et les observations de Me Thomé pour la communauté urbaine de Bordeaux ;

1. Considérant que, par délibération du 22 février 2008, le conseil de la communauté urbaine de Bordeaux a décidé de l’ouverture d’une concertation préalable ayant notamment pour objet la réalisation de la ligne « Tram-train du Médoc » de l’agglomération ; que cette concertation préalable s’est déroulée du 1er avril 2008 au 19 juin 2008 ; que, par délibération n° 2009-0708 du 6 novembre 2009, le conseil de la communauté urbaine de Bordeaux a arrêté le dossier définitif du projet de création de la ligne « Tram-train du Médoc » ; que, par délibération du 27 mai 2011, le conseil de la communauté urbaine a demandé l’ouverture d’une enquête publique ; que, par arrêté du 12 octobre 2011, le préfet de la Gironde a prescrit l’ouverture d’une enquête préalable à la déclaration d’utilité publique de la création de la ligne « Tram-train du Médoc » ; que l’enquête publique s’est déroulée du 7 novembre 2011 au 9 décembre 2011 ; que le commissaire enquêteur a remis son rapport le 20 janvier 2012 ; que, par délibération du 16 mars 2012 valant déclaration de projet, le conseil de la communauté urbaine de Bordeaux a déclaré d’intérêt général le projet de création de la ligne « Tram-train du Médoc » ; que, par arrêté du 23 mars 2012, le préfet de la Gironde a déclaré d’utilité publique au profit de la communauté urbaine de Bordeaux les travaux nécessaires à la création de la ligne « Tram-train du Médoc » ; que ce même arrêté a emporté mise en compatibilité du plan local d’urbanisme de la communauté urbaine de Bordeaux ;

2. Considérant qu’il résulte du mémoire produit le 21 décembre 2012 par les requérants que ces derniers doivent être regardés comme se désistant de leurs conclusions présentées le 15 juin 2012 et tendant à l’annulation des délibérations du conseil de la communauté urbaine de Bordeaux des 16 janvier 2009, 6 novembre 2009 et 27 mai 2011 et comme excipant de l’illégalité de la délibération du 6 novembre 2009 au soutien de leurs conclusions à fin d’annulation dirigées contre l’arrêté du préfet de la Gironde du 23 mars 2012 ; que rien ne s’oppose à ce qu’il soit donné acte de ce désistement ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par le préfet de la Gironde et la communauté urbaine de Bordeaux :

3. Considérant qu’aux termes de l’article 2 de ses statuts, l’association TRANS’CUB a pour objet de « réfléchir de proposer et d’agir dans tous les domaines de la communauté urbaine de Bordeaux(…) dans le but de promouvoir l’intérêt général sur la base des critères d’efficacité économique, de solidarité sociale et de qualité de la vie (…) » ; qu’elle justifie ainsi d’un intérêt suffisant lui donnant qualité pour agir contre l’arrêté du préfet de la Gironde du 23 mars 2012 ; qu’en outre, son président et président du conseil d’administration est habilité à introduire toute action en justice en vertu de l’article 10 des statuts ; que M.B..., qui justifie de sa qualité de président, est ainsi habilité à présenter la requête au nom de l’association ;

4. Considérant que MM.G..., B...et E..., habitant respectivement à Bordeaux, Mérignac et Bruges justifient personnellement, en tant que résidents sur le territoire de l’agglomération bordelaise et usagers du réseau de transport en commun de la communauté urbaine de Bordeaux, d’une qualité leur conférant un intérêt personnel pour agir contre l’arrêté attaqué ;

5. Considérant qu’aux termes de l’article R. 411-1 du code de justice administrative : « La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours. » ;

6. Considérant que, contrairement à ce que soutiennent le préfet de la Gironde et la communauté urbaine de Bordeaux, la requête présentée par M. G...et autres contenait l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge ; que dès lors, les fins de non-recevoir opposées par le préfet de la Gironde et la communauté urbaine de Bordeaux doivent être écartées ;

Sur les conclusions à fin d’annulation et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

7. Considérant que les requérants soutiennent que les dispositions de l’article 14 de la loi d’orientation des transports intérieurs (LOTI) du 30 décembre 1982 modifiée, telles qu’elles ont été codifiées aux articles L. 1511-1 à L. 1511-3 du code des transports par l’ordonnance n° 2010-1037 du 28 octobre 2010, et celles du décret d’application du 17 juillet 1984 ont été méconnues ;

8. Considérant qu’aux termes de l’article L. 1511-1 du code des transports : « Les choix relatifs aux infrastructures, aux équipements et aux matériels de transport dont la réalisation repose, en totalité ou en partie, sur un financement public sont fondés sur l'efficacité économique et sociale de l'opération. / Ils tiennent compte des besoins des usagers, des impératifs de sécurité et de protection de l'environnement, des objectifs de la politique d'aménagement du territoire, des nécessités de la défense, de l'évolution prévisible des flux de transport nationaux et internationaux, du coût financier et, plus généralement, des coûts économiques réels et des coûts sociaux, notamment de ceux résultant des atteintes à l'environnement. » ; qu’aux termes de l’article L. 1511-2 du même code : « Les grands projets d'infrastructures et les grands choix technologiques sont évalués sur la base de critères homogènes intégrant les impacts des effets externes des transports sur, notamment, l'environnement, la sécurité et la santé et permettant des comparaisons à l'intérieur d'un même mode de transport ainsi qu'entre les modes ou les combinaisons de modes de transport. » ; qu’aux termes de l’article L. 1511-3 du même code : « Les évaluations des grands projets d'infrastructures et des grands choix technologiques mentionnés à l'article L. 1511-2 sont rendues publiques avant l'adoption définitive des projets concernés dans les conditions fixées à l'article L. 1511-4. » ; qu’aux termes de l’article L. 1511-4 du même code : « (…) le dossier de l'évaluation est jointe au dossier de l'enquête publique à laquelle est soumis le projet ou le choix mentionné à l'article L. 1511-2. Cette enquête publique est réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement. (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 11-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique : « L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement : I.-Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages : (…) 7° L'évaluation mentionnée à l'article 5 du décret n° 84-617 du 17 juillet 1984 pris pour l'application de l'article 14 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, lorsque les travaux constituent un grand projet d'infrastructures tels que défini à l'article 3 du même décret. (…) ; qu’aux termes de l’article 4 du décret du 17 juillet 1984 relatif à l'application de l'article 14 de la loi 82-1153 du 30 décembre 1982 relatif aux grands projets d'infrastructures, aux grands choix technologiques et aux schémas directeurs d'infrastructures en matière de transports intérieurs : « L'évaluation des grands projets d'infrastructures comporte : 1° Une analyse des conditions et des coûts de construction, d'entretien, d'exploitation et de renouvellement de l'infrastructure projetée ; 2° Une analyse des conditions de financement et, chaque fois que cela est possible, une estimation du taux de rentabilité financière 3° Les motifs pour lesquels, parmi les partis envisagés par le maître d’ouvrage, le projet présenté a été retenu (…) / L'évaluation des grands projets d'infrastructures comporte également une analyse des différentes données de nature à permettre de dégager un bilan prévisionnel, tant des avantages et inconvénients entraînés, directement ou non, par la mise en service de ces infrastructures dans les zones intéressées que des avantages et inconvénients résultant de leur utilisation par les usagers. Ce bilan comporte l'estimation d'un taux de rentabilité pour la collectivité calculée selon les usages des travaux de planification. Il tient compte des prévisions à court et à long terme qui sont faites, au niveau national ou international, dans les domaines qui touchent aux transports, ainsi que des éléments qui ne sont pas inclus dans le coût du transport, tels que la sécurité des personnes, l'utilisation rationnelle de l'énergie, le développement économique et l'aménagement des espaces urbain et rural. Il est établi sur la base de grandeurs physiques et monétaires ; ces grandeurs peuvent ou non faire l'objet de comptes séparés./ Les diverses variantes envisagées par le maître d’ouvrage d’un projet font l’objet d’évaluations particulières selon les mêmes critères. L’évaluation indique les motifs pour lesquels le projet présenté a été retenu » ; qu’aux termes de l’article 5 du même décret : « L'évaluation d'un grand projet d'infrastructures incombe au maître d'ouvrage et est financée par lui. » ;

9. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que l’évaluation économique et sociale des grands projets d’infrastructures de transport qu’elles imposent de rendre publique avant l’adoption définitive de tels projets ne peut avoir d’effet utile en vue d’établir l’utilité publique de l’opération que si, notamment, les données chiffrées et les valeurs agrégées sur lesquelles cette évaluation se fonde sont, en relation avec l’importance du projet en cause, présentées en fonction de critères homogènes sous une forme synthétique et lisible pour le public, et fournies avec une explication suffisante quant à leur provenance et à leur justification permettant d’en vérifier la sincérité et la cohérence ; que les inexactitudes, omissions ou insuffisances de l’évaluation économique et sociale ne sont toutefois de nature à vicier la procédure et à entraîner l’illégalité de l’arrêté portant déclaration d’utilité publique du projet que si elles ont eu pour effet de nuire à l’information de l’ensemble des personnes intéressées par l’opération ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur les résultats de l’enquête publique et, par suite, sur la décision de l’autorité administrative ;

10. Considérant que l’opération déclarée d’utilité publique par l’arrêté en litige porte sur la réalisation, pour un coût total estimé à 96,7 millions d’euros, non pas d’une ligne nouvelle de transport en commun par « tram-train », mais d’une nouvelle section de ligne de tramway susceptible d’être transformée dans l’avenir en ligne dite de tram-train, d’une longueur de 7,1 km ; que celle-ci sera réalisée principalement sur les emprises de Réseau ferré de France, desservira les communes de Bordeaux, de Bruges et de Blanquefort, et comportera six stations ; que la ligne doit aboutir, à la station terminale de Cracovie, à un raccordement à la ligne C du tramway de l’agglomération de Bordeaux par terminus partiel permettant le transfert des usagers sur la ligne C sans rupture de charge, les rames continuant leur parcours sur la ligne C après le franchissement d’un aiguillage ; que ce projet s’inscrit dans le cadre des travaux dits de « 3ème phase » ayant également pour objet l’extension des lignes A, B et C du tramway et la création d’une nouvelle ligne D destinée à desservir, comme la liaison dite « tram-train », le cadran nord-ouest de l’agglomération bordelaise ;

11. Considérant que la communauté urbaine de Bordeaux a fait le choix d’appréhender le projet de ligne de « tram-train » comme un projet distinct des projets d’extension des lignes A, B , et C du tramway ; que l’infrastructure, encore que son utilisation par les trains n’est envisagée qu’à plus long terme et nécessite des études plus approfondies en ce qui concerne notamment les passages à niveau à mettre aux normes pour la circulation du train comme du tramway, présente en effet la spécificité d’être conçue évolutivement en vue d’une exploitation en tram complémentaire à la desserte en trains par le réseau régional (TER) en direction du Verdon et pouvant se substituer aux TER périurbains ; que le projet a ainsi donné lieu à une enquête publique et à un arrêté distinct relatifs à l’utilité publique de l’opération ; que, dès lors, l’évaluation économique et sociale du projet, afin de permettre de déterminer l’utilité publique spécifique de la nouvelle ligne, devait comporter une analyse des coûts, des conditions de financement, du parti retenu et des incidences de ce choix spécifique à la ligne de tram-train, compte tenu notamment de la fréquentation attendue sur le parcours de la ligne et donc de sa rentabilité propre ;

12. Considérant que l’« évaluation socio-économique » fait l’objet de la pièce n° 7 du dossier d’enquête publique ; qu’elle comporte tout d’abord une analyse des motifs du projet de ligne, justifié par la nécessité de mobiliser un gisement de clientèle des transports en commun jusqu’à présent mal exploité et de contribuer ainsi à réduire l’engorgement de l’agglomération bordelaise ; qu’elle justifie le choix d’une infrastructure pouvant évoluer en liaison tram-train en vue de multiplier les interconnexions possibles entre le réseau de tramway et celui de train régional à partir du terminal TER de la gare Saint-Jean à Bordeaux ; qu’elle rappelle les deux variantes de raccordement ( tracé « Cracovie » et tracé « Ravezies ») et le choix retenu du premier tracé, présente les offres de service de transport à l’horizon 2016 ainsi que les prévisions de trafic en 2014 et en 2016 par rapport au trafic constaté en 2008, évalue à 42 500 montées par jour en 2014 et à 48 100 montées par jour en 2016 la fréquentation quotidienne de la future liaison s’effectuant en partie sur le tronc commun avec la ligne C, indique que 7 à 8 rames de tramway d’un coût unitaire de 3 250 000 euros HT (prix 2008), seront exploitées sur la ligne, l’investissement hors matériel roulant se montant à 77 millions d’euros HT et indique un coût de fonctionnement par véhicule et par kilomètre ;

13. Considérant, en premier lieu, en ce qui concerne les perspectives de fréquentation, que l’évaluation retient en page 28 une fréquentation pour la jonction du « tram-train » du Médoc de 42 500 usagers montants par jour en 2014 et de 48 100 usagers montants par jour en 2016 supérieure à l’évaluation de la fréquentation de la ligne C (respectivement 36 600 et 47 700) ; que ces prévisions sont établies par référence à la « situation 2008 » définie comme le « réseau théorique comprenant l’extension à Carbon Blanc de la ligne A – les trafics de 2008 sont les trafics d’un jour fort de novembre issus de l’enquête O-D TC de 2008 » ; qu’il résulte notamment des explications fournies à l’audience que ces prévisions sont justifiées par l’ « effet de réseau » résultant de l’usage futur, sur la ligne C, des rames appelées à assurer le service sur la ligne de « tram-train » et plus généralement de la mise en commun du matériel roulant sur les différentes lignes en fonction des besoins de la fréquentation ainsi que le confirment les informations de la page 30 relatives à l’équipement en matériel roulant ; que, toutefois, si ce surcroît de fréquentation des rames est de nature à en améliorer la rentabilité et pouvait légitimement être pris en compte par le maître d’ouvrage dans une appréciation de l’utilité publique du réseau de tramway étendu, pris dans son ensemble, le public, quant à lui, ne dispose pas d’une prévision suffisamment justifiée de la fréquentation spécifique de la seule ligne de « tram-train » entre la station de Blanquefort et celle de Cracovie connectée à la ligne C alors au surplus qu’une partie substantielle de la ligne sera implantée dans des secteurs urbains de moindre densité engendrant une fréquentation très sensiblement inférieure à celle observée dans la partie du réseau desservant Bordeaux à l’intérieur des boulevards ; que les taux d’augmentation retenus pour prévoir l’évolution future de la fréquentation ne sont pas explicités eu égard à l’expérience acquise depuis la mise en service des lignes de tramway A, B et C et à la fréquentation réelle du réseau alors qu’un fléchissement du taux d’augmentation de la fréquentation pouvait être constaté lors de l’établissement de l’évaluation socio-économique ; que la communauté urbaine s’est en réalité fondée une hypothèse intermédiaire dont il est précisé qu’elle reste «ambitieuse » et qui reprend les objectifs de fréquentation 2013 annoncés par l’exploitation du réseau TBc et ceux de fréquentation 2020 annoncés par la CUB ; que cette évaluation, qui atteint près de 10 % du total de la fréquentation du réseau de tramway, ne peut donc représenter l’évaluation de la fréquentation de la seule ligne aménagée de la station Cracovie au terminus de Blanquefort mais une fréquentation cumulée ; que, sur ce premier point, l’évaluation ne paraît pas suffisamment sincère et réaliste pour qu’elle puisse satisfaire aux exigences des dispositions précitées de l’article 4 du décret du 17 juillet 1984 ;

14. Considérant, en deuxième lieu, que les coûts d’exploitation et d’entretien de la ligne de tramway ne sont renseignés que sous la forme d’un coût moyen de 7,02 euros par véhicule et par kilomètre sur la base des données KEOLIS 2010 de telle sorte que, compte tenu de l’incertitude quant au nombre de kilomètres effectivement parcouru par les rames exploitées sur la ligne de « tram-train » mais continuant leur parcours jusqu’à Bègles, l’évaluation ne permet de disposer d’une analyse même sommaire du coût d’exploitation réel de la ligne de tramway ; que, sur ce point, l’évaluation socio-économique méconnaît également les exigences codifiées à l’article L. 1511-2 du code des transports et précisées par le 1° de l’article 4 du décret du 17 juillet 1984 ;

15. Considérant, en troisième lieu, que s’il est indiqué en page 30 qu’ « à l’horizon de la mise en service », 7 à 8 rames d’un coût unitaire de 3,250 millions d’euros seront utilisées sur la ligne de tram-train, l’évaluation ne permet pas de déterminer le nombre de rames effectivement nécessaires pour l’exploitation de la seule ligne tram-train au niveau de fréquentation prévu et par suite le coût effectif du matériel roulant requis ; qu’en effet, ainsi que cela a été relevé au point précédent, cette prévision prend en compte le coût du matériel roulant qui sera utilisé non seulement sur la ligne « tram-train », mais à plus long terme sur la ligne C pour permettre aux usagers de poursuivre leur voyage en transitant sans rupture de charge à la station Cracovie ; qu’il n’est pas possible de déterminer le coût spécifique d’équipement de la ligne de « tram-train » en matériel roulant et la rentabilité de l’investissement au regard de la fréquentation attendue de la seule ligne appréhendée comme projet distinct nécessairement plus faible que sur les sections centrales de la ligne C ;

16. Considérant, en quatrième lieu, en ce qui concerne les conditions de financement du projet, que l’évaluation socio-économique comporte essentiellement des données générales sur la stratégie de financement de la communauté urbaine de Bordeaux marquée par la priorité du financement des transports, mais ne fournit aucune information spécifique au projet de ligne tram-train qui a pourtant été traité comme un grand projet distinct ;

17. Considérant, en cinquième lieu, que, s’agissant de la valeur temps, qui est une composante permettant de déterminer quantitativement les avantages attendus du projet, il ressort des pièces du dossier que la communauté urbaine de Bordeaux s’est fondée sur une valeur de 13,08 euros/heure en 2008 ; que l’instruction cadre du 27 mai 2005 relative aux méthodes d’évaluation économique des grands projets d’infrastructures de transport préconise à titre indicatif de retenir une valeur temps au titre de l’année 2000 comprise entre 5,50 et 11,10 euros/heure ou une valeur moyenne de 7,60 euros/heure selon les circonstances qui doivent s’appliquer à des trafics hétérogènes hors Ile de France comme ceux en litige ; que s’il est tenu compte des documents du commissariat général à la stratégie et à la prospective, la valeur temps devait être fixée au titre de 2010 à une valeur plus proche de 8 ou 9 euros euro/heure ; que pour justifier les valeurs retenues, la communauté urbaine de Bordeaux se borne à faire valoir que les valeurs préconisées par le commissariat au plan n’étaient pas pertinentes et qu’elle souhaitait conserver une cohérence avec les évaluations menées pour les phases 1 et 2 du tramway ; que ce faisant, elle n’a pas satisfait aux dispositions précitées qui renvoient expressément aux usages des travaux de planification et doit être regardée comme ayant surévalué la valeur temps à appliquer à des déplacements hétérogènes dans l’agglomération de Bordeaux ;

18. Considérant, en sixième lieu, que l’évaluation ne consacre que des développements succincts au bilan socio-économique de la nouvelle ligne et affiche un bénéfice actualisé de 3,9 millions, qui ne représente que 0,8% du bénéfice actualisé de l’ensemble du programme de la 3ème phase de tramway (454 millions d’euros), c'est à dire une part très sensiblement inférieure à la fréquentation de la ligne en litige rapportée à la fréquentation totale du réseau ; que, de surcroît, les agrégats composant le bénéfice actualisé ne sont pas chiffrés et ne peuvent pas être vérifiés alors au surplus que la surévaluation de la fréquentation de la ligne entache nécessairement d’erreur les prévisions de recettes, qui ont été prises en compte, et les avantages attendus en termes de réduction de temps de transport par les usagers ; qu’il résulte de ce bénéfice actualisé, qui ne peut donc être tenu pour une prévision sincère et fiable, un taux de rentabilité interne du projet, de 4 %, à peine supérieur au taux d’actualisation (3,8%) ; qu’ainsi, le public ne peut être assuré que, compte tenu des inexactitudes qui peuvent affecter son calcul, du fait notamment de la surévaluation des prévisions de fréquentation de la ligne, le projet est effectivement rentable autrement que par une péréquation des coûts d’exploitation avec les autres sections du réseau de tramway plus intensivement fréquentées ;

19. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’évaluation socio-économique du projet de ligne « tram-train », eu égard à l’ importance de l’opération, et en raison de l’effet cumulé des insuffisances dont elle est entachée, ne peut pas être regardée comme répondant aux exigences des dispositions précitées ; que les autres documents de la consultation, notamment l’étude d’impact, ne sont pas de nature à avoir pallié les insuffisances relevées précédemment ; que le public n’a donc pas été mis à même d’apprécier l’utilité publique de l’opération ; que ce dernier a ainsi été privé d’une garantie essentielle au bon déroulement de la consultation ; qu’aussi bien le tribunal n’est-il pas non plus à même d’apprécier le bilan spécifique du projet et son utilité publique, appréhendés distinctement des autres opérations de la phase 3 du tramway de l’agglomération bordelaise ; que, par suite, la procédure au terme de laquelle l’arrêté du préfet de la Gironde du 23 mars 2012 a été pris, est entachée, au regard de l’article L. 1511-2 du code des transports et du décret précité du 17 juillet 1984, d’irrégularités substantielles qui affectent, dans son ensemble, la légalité de cet acte ; que, sans qu’il soit besoin de faire droit aux demandes de production de documents présentées par les requérants, ces derniers sont fondés à demander l’annulation de l’arrêté attaqué ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. G... et autres, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la communauté urbaine de Bordeaux demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement des conclusions à fin d’annulation présentées par M. G... et autres et dirigées contre les délibérations du conseil de la communauté urbaine de Bordeaux en date du 16 janvier 2009, du 6 novembre 2009 et du 27 mai 2011.

Article 2 : L’arrêté du préfet de la Gironde du 23 mars 2012 est annulé.

Article 3 : Les conclusions de la communauté urbaine de Bordeaux tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. A... G..., à l’association TRANS’CUB, à M. F... B..., à M. C... E..., au ministre de l’égalité des territoires et du logement, à la communauté urbaine de Bordeaux et au préfet de la Gironde.