Vu la requête enregistrée le 20 août 2009, présentée pour Mme D...H...épouseF..., M. E...F..., M. C...I...-F..., Mlle G...F...et Mlle B...F..., demeurant..., par Me Nunez, avocat au barreau de Périgueux ; les consorts F...demandent au tribunal :

- de condamner l’Etat à verser la somme de 15 000 euros à Mme D...F...et à M. E...F..., ainsi que la somme de 10 000 euros à M. C...I...-F..., Mlle G... F...et Mlle B...F..., en réparation de leur préjudice moral résultant du suicide de leur fils et frère, M. A...F..., survenu au centre de détention de Neuvic, le 8 mars 2007 ;

- de mettre à la charge de l’Etat une somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le mémoire en défense enregistré le 30 avril 2010, présenté par le ministre d’Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, qui conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à la réduction des prétentions indemnitaires des requérants ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 septembre 2011 :

- le rapport de M. Monge, premier conseiller ;

- les observations de Me Nunez pour les consortsF... ;

- les conclusions de Mme Aubert, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Nunez ;

Considérant que M. A...F..., incarcéré à ...; qu’il a été découvert pendu à l’aide d’un drap dans sa cellule le 8 mars 2007 à 0 heure 23 et son décès a été constaté à 1 heure 30 après des manœuvres de réanimation demeurées vaines ; que le procureur de la République de Périgueux a ouvert une information aux fins de détermination des causes de la mort en désignant un juge d’instruction à cette fin, et a classé l’affaire sans suite le 23 juin 2008 ; que ce classement sans suite a été confirmé le 2 février 2009 après que les parents du défunt et leurs enfants ont déposé plainte pour homicide involontaire et délaissement d’une personne hors d’état de se protéger ; que les consorts F...ont formé un recours auprès du garde des sceaux, ministre de la justice, pour obtenir réparation de leur préjudice moral résultant du suicide de leur fils et frère, dont ils imputent la responsabilité à l’administration pénitentiaire ; que ce recours ayant été rejeté le 16 juillet 2009, ils demandent la condamnation de l’Etat à verser la somme de 15 000 euros aux parents de Gaël et la somme de 10 000 euros à ses trois frère et sœurs ;

Considérant que les consorts F...soutiennent que les antécédents psychiatriques de leur fils et frère étaient connus des services de l’administration pénitentiaire et auraient dû, particulièrement à la suite d’une nouvelle tentative de suicide survenue le 3 mars 2007, impliquer une vigilance accrue avec surveillance constante de ce détenu ; qu’il résulte de l’instruction que la fragilité psychologique de l’intéressé et les tentatives de suicide qu’il avait commises notamment lors de précédentes incarcérations étaient connues lors de son incarcération à la maison d’arrêt de Tarbes ; qu’il a fait l’objet d’un suivi régulier par la commission locale de suivi du centre de détention de Neuvic et a été assujetti au « régime différencié », qui entraîne une surveillance plus appuyée, à la suite de l’incendie volontaire de sa propre cellule survenu le 6 janvier 2007 ; que si sa tentative de suicide du 3 mars 2007 a nécessité un transfert au service des urgences de l’hôpital de Périgueux, où il est demeuré 24 heures en observation avant d’être réincarcéré à Neuvic, le médecin psychiatre qui l’a examiné le 4 mars 2007 a conclu à un état calme et apaisé ; qu’aucun signe avant-coureur de la crise suicidaire traversée par l’intéressé avant son passage à l’acte n’a pu alerter l’administration, ni le médecin coordonnateur de l’unité de consultation et soins ambulatoires du centre de détention de Neuvic, qui l’a examiné la veille de son suicide, le 7 mars 2007 au soir, ni les surveillants n’ayant remarqué un changement de son comportement ; que, dans ces conditions, l’administration pénitentiaire ne peut être regardée comme ayant commis une faute dans l’organisation et le fonctionnement du service, la circonstance que M. A...F...a été laissé en possession de ses draps de couchage qui ont servi à son suicide ne suffisant pas à constituer un défaut de vigilance fautif ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les consorts F...ne sont pas fondés à rechercher la responsabilité de l’administration pénitentiaire à la suite du suicide de leur fils et frère et à demander la condamnation de l’Etat à les indemniser de leur préjudice ; Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que les consorts F...demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête des consorts F...est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié aux consorts F...et au garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.