Vu la requête, enregistrée le 15 janvier 2009 sous le numéro 0900170, présentée pour la SAS SAPHIR, dont le siège est ZAC des Miquelots à La Teste-de-Buch (33260), par Me C..., avocat ; la SAS SAPHIR demande au tribunal :

- d’annuler la décision de la commission départementale de l’équipement commercial (CDEC) de la Gironde, en date du 25 novembre 2008, qui autorise la société Leroy Merlin France à créer un magasin de bricolage et de produits d'habitat d’une surface totale de vente de 10 000 m² sur le territoire de la commune de Biganos ;

- de mettre à la charge de la société Leroy Merlin France et l'Etat une somme de 2 000 euros chacun au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 avril 2010, présenté pour la société Leroy Merlin France qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la SAS SAPHIR au paiement d'une somme de 8 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le mémoire, enregistré le 19 avril 2010, présenté par le préfet de la Gironde qui conclut au rejet de la requête ; …………………………………………………………………………………………………………

Vu les mémoires, enregistrés les 24 avril et 4 mai 2009, présentés pour la SAS SAPHIR qui conclut aux mêmes fins que précédemment ; …………………………………………………………………………………………………………

Vu le mémoire, enregistré le 25 mai 2010, présenté pour la SAS SAPHIR qui conclut aux mêmes fins que précédemment ; …………………………………………………………………………………………………………

Vu le mémoire, enregistré le 3 juin 2010, présenté pour la société Leroy Merlin France qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;

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Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de commerce ;

Vu la loi n°2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, notamment ses articles 102 et 105 ;

Vu le décret n°2008-1212 du 24 novembre 2008 relatif à l'aménagement commercial, notamment son article 8 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 février 2010 ;

- le rapport de Mme Billet-Ydier, premier conseiller ;

- les observations de Me B...à la décharge de Me A...pour la SA Leroy Merlin France, société défenderesse ;

- et les conclusions de M. Riou, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me B...après les conclusions du rapporteur public ;

Considérant que la commission départementale d'équipement commercial (CDEC) de la Gironde, réunie le 25 novembre 2008, a accordé à la société Leroy Merlin France l'autorisation de créer à Biganos une surface commerciale de bricolage et de produits d'habitat de 10 000 m² sous l'enseigne Leroy Merlin ; que par requête enregistré le 15 janvier 2009, la SAS SAPHIR demande l'annulation de l'autorisation accordée ;

Sur la recevabilité de la demande :

Considérant que les dispositions de l’article L. 227-6 du code de commerce concernant les sociétés par actions simplifiées (SAS) prévoient que : « La société est représentée à l'égard des tiers par un président désigné dans les conditions prévues par les statuts. Le président est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société dans la limite de l'objet social. / Dans les rapports avec les tiers, la société est engagée même par les actes du président qui ne relèvent pas de l'objet social, à moins qu'elle ne prouve que le tiers savait que l'acte dépassait cet objet ou qu'il ne pouvait l'ignorer compte tenu des circonstances, étant exclu que la seule publication des statuts suffise à constituer cette preuve. / Les statuts peuvent prévoir les conditions dans lesquelles une ou plusieurs personnes autres que le président, portant le titre de directeur général ou de directeur général délégué, peuvent exercer les pouvoirs confiés à ce dernier par le présent article. / Les dispositions statutaires limitant les pouvoirs du président sont inopposables aux tiers » ; qu’il résulte de ces dispositions qu’une société par actions simplifiées est régulièrement représentée devant la juridiction administrative par son président sans que ce dernier ait à justifier d’un mandat ;

Considérant qu'il est constant que M. Serge Moncomble président de la SAS SAPHIR, justifie à ce titre de sa qualité pour représenter la société à l’instance ; que la fin de non recevoir soulevée par la société Leroy Merlin France tirée de ce que la requérante ne serait pas régulièrement représentée ne peut qu’être écartée ;

Sur les conclusions en annulation :

Considérant qu’aux termes de l’article 1er du code civil : « Les lois et, lorsqu'ils sont publiés au Journal officiel de la République française, les actes administratifs entrent en vigueur à la date qu'ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication. Toutefois, l'entrée en vigueur de celles de leurs dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures. / En cas d'urgence, entrent en vigueur dès leur publication les lois dont le décret de promulgation le prescrit et les actes administratifs pour lesquels le Gouvernement l'ordonne par une disposition spéciale. / Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux actes individuels » ; qu'aux termes de l'article 8 du décret n°2008-1212 du 24 novembre 2008, publié au Journal officiel du 25 novembre 2008 : « Les articles 102 et 105 de la loi n°2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie entrent en vigueur dès la publication du présent décret au Journal officiel de la République française. » ; qu’il résulte de ces dispositions que les articles 102 et 105 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 sont entrés en vigueur le 25 novembre 2008 ;

Considérant qu’aux termes de l'article L. 751-2 du code de commerce issu de l’article 102 de la loi du 4 août 2008 ainsi applicable aux faits du litige : « I.-La commission départementale d'aménagement commercial est présidée par le préfet. II.-Dans les départements autres que Paris, elle est composée : 1° Des cinq élus suivants : a) Le maire de la commune d'implantation ; b) Le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'aménagement de l'espace et de développement dont est membre la commune d'implantation ou, à défaut, le conseiller général du canton d'implantation ; c) Le maire de la commune la plus peuplée de l'arrondissement, autre que la commune d'implantation ; en dehors des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne et des communes de l'Essonne, du Val-d'Oise, des Yvelines et de Seine-et-Marne appartenant à l'agglomération parisienne, dans le cas où la commune d'implantation appartient à une agglomération multicommunale comportant au moins cinq communes, le maire de la commune la plus peuplée est choisi parmi les maires des communes de ladite agglomération ; d) Le président du conseil général ou son représentant ; e) Le président du syndicat mixte ou de l'établissement public de coopération intercommunale chargé du schéma de cohérence territoriale auquel adhère la commune d'implantation ou son représentant ou, à défaut, un adjoint au maire de la commune d'implantation. /Lorsque l'un des élus détient plusieurs des mandats mentionnés ci-dessus, le préfet désigne pour le remplacer un ou plusieurs maires de communes situées dans la zone de chalandise concernée ; 2° De trois personnalités qualifiées en matière de consommation, de développement durable et d'aménagement du territoire. / Lorsque la zone de chalandise du projet dépasse les limites du département, le préfet complète la composition de la commission en désignant au moins un élu et une personnalité qualifiée de chaque autre département concerné. / Pour éclairer sa décision, la commission entend toute personne dont l'avis présente un intérêt. (...) » ;

Considérant qu'il ressort de la décision attaquée que cette dernière a été prise, non par la commission départementale d’aménagement commercial dans la composition prévue par l’article L. 751-2 précité du code de commerce, mais par la commission départementale d’équipement commercial instituée par le préfet de la Gironde le 20 décembre 1999 et composée conformément à l’arrêté préfectoral du 30 octobre 2008 pris en application de la réglementation en vigueur antérieurement au 25 novembre 2008 ; que la société SAPHIR est fondée à soutenir qu’il a été fait application de dispositions qui n’étaient plus applicables à la date à laquelle la commission a délibéré et que, pour ce motif, la décision contestée est entachée d'illégalité et doit être annulée ;

Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SAS SAPHIR, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la société Leroy Merlin France au titre de l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu’il y a lieu, en revanche, de faire droit aux conclusions de la SAS SAPHIR en mettant à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros sur le fondement des mêmes dispositions ; qu’il n’y a pas lieu de condamner la société Leroy Merlin France au même titre ;

D E C I D E :

Article 1er : La décision de la commission départementale d’équipement commercial de la Gironde du 25 novembre 2008 accordant à la société Leroy Merlin France l’autorisation préalable requise en vue de la création d’une surface commerciale de bricolage et de produits d'habitat de 10 000 m² à Biganos (Gironde) est annulée.

Article 2 : L'Etat versera une somme de 1 200 euros à la SAS SAPHIR au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la société SAPHIR et les conclusions de la société Leroy Merlin France tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à la SAS SAPHIR, à la société Leroy Merlin France et au préfet de la Gironde.